Déambulation nocturne... { PV }

Invité

La journée avait eu son lot habituel de contrariétés, de malentendus, et de conflits. Jared Morohtar, guérisseur expérimenté, avait dévoilé une fois de plus son art à la population, remplissant son office, et ne se démarquant pour rien au monde. Habituelle contrainte qui ne manquait jamais de résuire le jeune homme à l’état de corps ambulant, dénué d’envie… En cette journée pluvieuse, Jared était sorti très tard de Sainte-Mangouste, de sorte qu’il faisait nuit noire. La lune éclairait la route, de sa blancheur immaculée, et donnait une allure des plus spectrales au jeune homme vêtu de noir. Triste ironie, il se confondait si bien dans son environnement…
Désabusé et désintéressé par son futur proche, Jared fut pris d’une idée soudaine et inopinée. Se rendre au village de Pré-Au-Lard. Pourquoi ? Pour passer le temps, et tenter d’oublier la répétition perpétuelle de sa vie. Il aurait tout le loisir de divaguer dans les rues vides du village, et pourrait observer la cabane hurlante, vestige d’un passé qui resterait flou pour la plupart des sorciers de cette aire. Oui, c’est pas l’ignorance de soi que l’humanité était devenue ce qu’elle était. Un environnement de conflit permanant, de corruption, et d’égocentrisme forcené. Très réjouissant, comme état de faits. Dans tous les cas, il fallait néanmoins s’en accommoder, et Jared y parvenait tant bien que mal.

Il transplana donc, sans se soucier du dérangement qu’il allait procurer aux habitants de la rue dans laquelle il se trouvait, et atterrit brusquement sur la place centrale de Pré-Au-Lard. Un nombre incalculable de boutiques, plus futiles les unes que les autres, parsemaient le champ de vision du jeune homme, et il ne leur accorda pas grande importance. De toute manière, à cette heure ci, tout était fermé, ce qui satisfaisait totalement Jared. Il prit un chemin aléatoirement, n’étant pour ainsi dire jamais venu dans ce village, par dédain du grouillement de population. Ce chemin menait à un cul de sac, très peu illuminé. Seules quelques poubelles s’y situaient, et l’état d’insalubrité dans lequel se trouvaient manifestement les habitations attenantes finit d’amuser Jared. Il possédait un don pour voir les lieux mal famés, et s’y précipitait sans même le vouloir.
Jaugeant le mur de séparation entre le cul de sac et un ancien prolongement, Jared décretta qu’il était capable de le franchir. C’est donc avec détermination qu’il entreprit de l’escalader, et finit par le franchir, non sans efforts. Durant sa réception de l’autre côté du mur, le jeune homme émit un bruit presque imperceptible, et se retint contre le mur.

Ce qu’il vit ne lui décrocha pas la moindre expression du visage. Il venait de franchir une sorte de frontière implicite entre le quartier riche et le quartier pauvre de Pré-Au-Lard. Ô idylle fortuite ! Comme quoi les sorciers se laissaient délibérément berner par un gouvernement qui refusait d’accepter la pauvreté d’une partie de la population. Triste sort…
Jared avança le long de la rue, et déboucha sur une place qui était cette fois, très illuminée. Une fontaine lui tendait les bras. Il s’en approcha et s’éclaboussa la figure avant de s’asseoir sur le rebord de la fontaine, et de sortir l’une de ses cigarettes moldues. Il l’alluma avec désinvolture, et scruta l’horizon. Tout paraissait paisible. Mais qu’en était il en réalité ? Personne ne le saurait… Un bruissement se fit soudainement ressentir sur la gauche. Jared tourna la tête et aperçut une forme, non loin de là. Il était conscient qu’il représentait le stéréotype même du danger public, dans ce contexte. Mais cela ne changeait pas beaucoup de ses habitudes. Il émit un mince rire ironique avant de détourner la tête, sans pour autant relâcher son attention sur le sorcier ( ou la sorcière ) assez téméraire pour sortir à cette heure ci…

Invité

Action ! Topaze en avait vu de toutes les couleurs pendant ce dernier mois : toujours des nouveautés, des rencontres - toujours des nouveaux climats, de nouveaux paysages. Réapprendre à vivre dans son propre pays était plus difficile qu'elle ne l'avait auparavant imaginé - rien n'était aussi simple et les couchers de soleil lui semblaient parfois médiocres, quand elle pensait à tous ceux qu'elle avait pu voir. Cependant, elle n'était pas le type de personnes qui devenaient aigries après le moindre voyage et les découvertes qui mènent finalement à une routine emplie de monotonie. Elle savait apprécier la valeur d'une journée, goûter à la saveur d'un moment et d'une seconde, observer avec émerveillement parfois un vol d'oiseau ou le rire d'un enfant. Ses grands yeux bleus aimaient à se promener autour d'elle, s'attachant partout, comme des figures imperceptibles, un spectateur témoin du monde extérieur tout en y appartenant. Plus ou moins. L'expérience d'une vie donnait à chacun une approche différente de l'univers - aussi, elle aimait à discuter avec des personnes et connaître leur avis, voir par leurs yeux, quelques instants tout du moins. Dernièrement, elle avait découvert une philosophie autre et pourtant parfois semblable, aux points communs et différés. Celle de Jared. Des hommes tels que lui se trouvaient peu, trop peu - elle s'en était rendue compte pendant cette soirée, quand elle s'était franchement mise face à lui, ses yeux bleus le fixant, sous la pluie torrentielle. Ses souvenirs étaient si présents encore, depuis une semaine, elle y pensait sans oser y revenir - Ste Mangouste lui semblait maintenant un lieu de plaisirs défendus. L'amour ne pouvait lui être offert car elle portait ses projets sur un homme qui sûrement n'avait pas les mêmes attentes et ne souhaitait pas s'allier à quelqu'un, ou alors pas encore. Son coeur battait.

Silence. Adossée contre le mur, dans le village de Pré-au-Lard, elle songeait ainsi, vaquant à des pensées mélancoliques, quand elle entendit des pas. La nuit était noire, mais la place dans laquelle elle se trouvait était largement éclairée, et une belle fontaine offrait un lieu de repos agréable à la vue. L'eau s'écoulait doucement, dans une cascade régulière et apaisante - Topaze l'observait depuis un certain moment, suivant des yeux les gouttelettes qui s'échappait du filet d'eau rejeté par la bouche des anges. En effet, c'était des statues d'anges, blancs, sculptées tout autour de la fontaine, crachant par leur bouche un nectar : l'eau transparente et fluide. Leurs ailes semblaient terriblement réelles, et on avait peur de les toucher, par crainte de les froisser. C'était un beau spectacle, et Topaze était ravie d'avoir trouvé ce lieu, ce soir-là où elle avait besoin de réconfort dans le silence et la solitude d'un instant. Il fallait qu'elle se remette en question et qu'elle pense aux sentiments qu'elle éprouvait maintenant, car elle ne pouvait pas se permettre de bêtises, d'erreurs. Penser à Jared signifiait qu'elle espérait un avenir, or pour le moment elle ne savait rien de ses envies à lui. Fermant les yeux, elle écouta les pas qui venaient puis ouvrit les yeux - alors, elle reconnut en un sursaut la silhouette de Jared. Pourquoi? Comment? Maintenant? Surprise, elle pensait que c'était du à un mirage, elle avait du prendre ses rêves pour réalité, cette ombre pour l'homme qui hantait ses nuits et peuplaient ses pensées. Mais plus elle s'attardait sur la forme lointaine de son visage, plus elle se sentait certaine que c'était lui - aussi quand il s'installa près de la fontaine, la silhouette dans la lumière, et une cigarette à la bouche, un léger sourire se dessina sur les lèvres de la jeune femme. Il contrastait vraiment avec les anges derrière lui : le bien et le mal. Symbolisés par le blanc de l'innocence et le noir. Jared était toujours habillé en noir - c'était une certitude chez Topaze, qui, lentement s'approcha de la fontaine, sentant posé sur elle le regard attentif de l'homme. Encore dans l'ombre, elle passa bientôt dans la lumière, parvenant à la fontaine, et elle s'installa avec une expression nonchalante auprès de Jared.

"Bonsoir, dit-elle avec un sourire amusé sur les lèvres. Auriez-vous une cigarette à donner à la belle inconnue d'un soir?"

Invité

Impensable… Les yeux écarquillés, Jared commençait à se demander s’il n’était pas sujet aux hallucinations les plus graves. Et pourtant… Son intuition ne l’avait pas trompé. Une jeune femme approchait lentement, et ne semblait pas éprouver la moindre peur à son égard. Elle lui rappelait vaguement quelqu’un. Un visage connu, c’était déjà ça. Jared n’était pas enclin à supporter une nouvelle discussion dénuée d’intérêt, avec un inconnu… Peut être serait il chanceux, en ce jour, ou plutôt cette nuit.
Expirant une bouffée de fumée, Jared leva les yeux jusqu’au balcon d’un appartement situé tout juste face à lui, et aperçut un rideau, écarté par une main. Quelqu’un l’observait à la dérobée… Stupide curiosité mêlée de peur, des simples d’esprit. Pourtant, le jeune homme resta de marbre. Il ne lui servirait à rien de manifester sa gêne, son dégoût… Il resterait aussi impassible qu’à l’accoutumée, et le regard scrutateur qui était posé sur lui dévierait de sa zone, instantanément.
Les yeux fermés, Jared se prit à écouter le bruit des pas qui s’approchaient de lui. La cadence était rythmée, agile. Une berceuse des plus ennivrantes, qui n’allait pas manquer de provoquer l’apparition d’un état second chez Jared. Il sembla se noyer, l’espace de quelques secondes, dans les méandres de son esprit, à la recherche d’on ne sait quelle pensée, quelle évasion… Il se serait endormi sur le rebord de la fontaine, si le temps avait suivi son cours, sans perturbation inopinée. Inopinée… plus ou moins, car nul être présent en ces lieux ne pouvait ignorer la présence de Topaze Shakespeare, sur le même rebord de fontaine que Jared. Ce sont ses paroles, désinvoltes au possibles, qui réussirent cependant à tirer Jared de sa léthargie subite. Oui, il reconnaissait l’intonation de cette voix, la contradiction qui y perçait, si l’on y faisait attention. Il ouvrit subitement les yeux et leva la tête, de sorte que sa cigarette manqua de tomber sur ses vêtements. Il la rattrapa avec maladresse, et jeta un regard amusé sur Topaze, avant de prendre la parole, moqueur…

"Comment résister, face à une telle nymphe ?
Je suis honoré de pouvoir vous faire don d’un tel gadget… Cependant, il risque d’altérer votre organisme si pur… Me pardonnerez vous mes offenses ?"

Etrange… Le pessimisme avait laissé place à l’humour. En effet, Jared n’avait pas encore accepté le fait qu’il avait influé sur le bien être d’une personne, qui qu’elle soit. Il se sentait souillé, et l’épisode d’il y a quelques jours ne voulait pas s’effacer de sa mémoire. Il était pris en tenaille…
Pourtant, il n’avait pas la moindre répulsion à se trouver face à Topaze. Quoi qu’elle puisse lui reprocher, ils se trouveraient face à l’acte accompli, et l’improvisation serait la meilleure chose à faire. Aussi, il garda un visage malicieux, et émit un sourire qui se voulait avenant, même s’il paraissait plus vicieux qu’autre chose. Jared n’avait pas l’intention de se prendre la tête ce soir, et il savait qu’il serait possible de l’éviter, en compagnie de Topaze…

Invité

Sourire. Un éblouissant changement dans l'expression de Jared, qui devenait humoristique, contenant une certaine tendresse qui se voulait encore distante. Avec un regard heureux, Topaze se sentait amusée et en même temps quelque peu gênée d'avoir retrouvé Jared ce soir-là, autour d'une promenade pendant laquelle elle devait réfléchir à ses sentiments. L'observant avec une certaine curiosité, elle n'eut pas à se poser une seule question : tout lui plaisait dans cet interlocuteur complémentaire, la partie qui lui manquait encore. Le pessimisme et l'humour, ce côté rebelle au regard cynique - un brun ténébreux, en somme. Malgré la distance, qui était encore l'obstacle le plus fort, elle sentait qu'il n'était pas insensible - pas complètement du moins - à leur relation. Ils était interlocuteurs, connaissances, mais elle avait l'impression que ça n'allait pas se finir là. Pas si tôt - pas comme ça. Avec un sourire, donc, elle écouta la réponse - moqueuse ou humoristique - du jeune homme et appuya son regard sur lui, pendant un certain temps, avant de pousser un soupir, ses yeux passant vers les immeubles autour d'eux, avec l'impression étrange qu'on les observait. Cependant, n'ayant trouvé aucun regard furtif, elle reporta son attention sur Jared.

"Nymphe, dites-vous? répéta-t-elle sans perdre son sourire empli d'une nonchalance élégante. Que me vaut de telles flatteries?
S'il altère à mon organisme, j'en prends la plus complète responsabilité, sans même avoir à vous pardonner. Je ne vous prends pas pour un saint, Jared, acheva-t-elle avec un clin d'oeil, tout en prenant de la bouche même de Jared, la cigarette qu'il fumait à ce moment-là."

D'un geste assuré, elle la passa entre ses propres lèvres, aspirant une grande bouffée de fumée - puis soufflant le tout face à elle, dans le vent libre et pur qui flottait. Elle ferma un instant les yeux puis toussa malgré elle, avec un grand rire amusé.

"Je ne joue pas très bien la comédie, avoua-t-elle. Je n'ai jamais fumé de ma vie - et je ne sais pas vraiment si ça me plaît. C'est une saveur étrange"

Son sourire s'élargissait d'instant en instant, et elle se sentait déjà à l'aise face à Jared - comme la dernière fois, dans l'hôpital. Elle se sentit alors embarrassée, se rappelant de la manière dont s'était finie leur entrevue : quand elle l'avait regardé en le laissant comprendre qu'elle ressentait de l'attirance pour lui. C'avait été clair, mais elle n'avait pas osé l'exprimer, de peur d'être rejetée peut-être, ou bien trouvant trop facile les mots eux-même. Un regard voulait tout dire, d'après elle. Elle en jeta donc un à Jared, puis toussa une nouvelle fois, prétextant la cigarette alors que c'était le rose qui lui montait aux joues.

Invité

Métamorphosée. C’est ainsi que Jared qualifiait Topaze. Face à lui, elle semblait bien plus libérée et confiante que jamais. C’était très déstabilisant pour le jeune homme, car il ne connaissait que très peu ce genre de comportement, et ne savait pas à quoi l’attribuer. La nuit ne faisait qu’accentuer la gêne qui s’empara subitement de lui, face à tant d’assurance. Pourtant, il savait que cette gêne serait on ne peut plus éphémère, et qu’il n’avait pas à se montrer réticent, sur ses gardes, face à Topaze. Il ressassait ces propos dans son esprit lorsqu’il sentit une main s’approcher de sa bouche, et lui voler rapidement sa cigarette. Pris de court, il fut tenté de réagir avec brusquerie, mais se retint lorsqu’il croisa le regard emplit de malice de la jeune femme. Stupide, Jared… Il ne savait décidément pas ce qu’étaient les relations amicales. Totalement incapable de réagir sans montrer sa gêne, le jeune homme se contenta de continuer à fixer Topaze dans les yeux, pendant qu’elle portait la cigarette à sa bouche. Et alors, il fut stupéfait d’apercevoir un changement brutal d’expression chez elle. La provocation malicieuse venait de laisser place à une sorte de dégoût informulé. Dégoût de la nicotine, sans aucuns doutes. Jared sourit d’un air amusé, et écouta les dernières paroles de son interlocutrice, sans broncher le moins du monde. Et seulement lorsqu’il fut certain qu’elle ne prononcerait plus rien, il prit la parole, avec une moquerie de plus en plus tonitruante dans le ton…

"De telles flatteries paraissent elles réellement hypocrites, de la bouche d’un pécheur ?"

Il rit sans aucune retenue, et reprit la cigarette des mains de la jeune femme. L’instinct du guérisseur, sans aucuns doutes. Il se voyait déjà, dans quelques années, debout dans son bureau, et administrant un médicament vain à une Topaze souffrante, atteinte d’une maladie incurable, causée par la cigarette. Assez de responçabilités… Assez… Son regard se fit plus sérieux, l’espace de quelques secondes, mais il reprit rapidement le contrôle. Jared ne désirait pas de conflit, simplement autre chose que le désintéressement, ou l’animosité. Replongeant ses yeux dans ceux de Topaze, il reprit la parole, en tentant de paraître moins moraliste que de coutume…

"Etrange… Je vous aurais presque crue… Jusqu’à ce qu’un froncement inopiné de vos sourcils me mette sur la voie. Je ne vous inciterai pas à continuer sur cette voie. Elle amène des tracas, et un plaisir contestable. Vous pouvez prétendre à mieux, j’ose l’espérer."

Un silence éloquent venait de tomber entre les deux jeunes gens. Encore une fois, Jared retombait dans sa philosophie, celle qui ne tolérait aucune contestation. Il haussa les sourcils face à sa propre maladresse, et détourna le regard pour le poser sur l’eau de la fontaine. Claire et translucide, elle représentait une porte ouverte vers la sincérité. Il allait laisser son regard errer sur cette eau lorsqu’une idée lui parvint à l’esprit. Malicieux, il regarda de nouveau Topaze, et capta un changement manifeste dans son regard. Ayant tousseté, l’espace de quelques secondes, elle lui adressait un regard étrange, que Jared mettrait longtemps à qualifier avec certitude. Pour lors, il savait simplement qu’un élément venait de troubler la jeune femme. Il ne réfléchit pas une seule seconde, et se rapprocha d’elle jusqu’à lui murmurer quelques mots à l’oreille…

"La bave du crapaud ne doit pas atteindre la blanche colombe…"

Jared ne savait plus où se trouvait la limite entre la sincérité et l’art dramatique. Et en toute honnêteté, peu lui importait l’issue de la discussion, il gardait son habituel comportement égocentrique. "Je teste une technique rhétorique, à des fins purement personnelles…". Pour autant, l’intensité de ces paroles lui resta omniprésente à l’esprit, comme si elles prennaient une autre envergure tout à coup. A quoi était-ce dû ? La honte d’avoir osé penser ainsi ? L’impression de ne pas être totalement sincère avec soi ? Ou simplement l’idée qu’un tel comportement ne faciliterait en rien l’évolution de leur discussion ? Jared ne savait pas quoi répondre à ses propres interrogations, et se contenta de fixer bizarrement Topaze…

Invité

Taquiner. Il jouait avec elle avec un air décontracté, le regard passant de la brume à la joie et le sourire apparaissant par intervalles irréguliers sur ses lèvres. La Lune brillait - plus ou moins, c'est vrai - et le ciel était rempli d'étoiles. Une nuit comme les autres, en somme, se dit Topaze avec un demi-sourire. Rendant sa cigarette à Jared - ne voulant pas retenter l'expérience désagréable ce soir-là - elle l'écouta se moquer, mais ne répondit pas. C'était une question rhétorique et moqueuse comme une autre, comme tous deux savaient si bien les formuler - mais elle ne trouvait pas qu'une réponse fût trop importante pour être dite. Quoiqu'il en soit, il reprit assez vite la parole, cette fois-ci avec beaucoup de sérieux, et elle mit une seconde seulement à comprendre qu'il la décourageait de fumer. Elle eut envie de rire mais détourna simplement le regard : c'était bien lui qui lui donnait des conseils sur la santé, et le bien-être. Après tout, pourquoi pas? Mais il n'avait pas une apparence de Saint-Esprit descendu pour souffler le bien sur des ailes refermées et meurtries.

"Je prendrai alors ma décision avec soin, dit-elle en souriant à Jared. C'est un jeu pour moi, pas une dépendance."

Les yeux entrouverts, elle se laissa aller à la brise douce qui filait dans la nuit, mais gardait des émotions troublées à propos de Jared, quand celui-ci, ayant perçu son regard ambigü et lourd de sens, se pencha vers elle. Alarmée, elle faillit reculer, mais comprit qu'il voulait simplement lui murmurer quelque chose, alors elle resta immobile et écouta avec un demi-sourire empli d'un frisson contenu ce que lui disait l'homme. Que la bave du crapaud ne doit pas atteindre la blanche colombe. Les yeux de Topaze s'écarquillèrent pendant quelques secondes, s'ouvrant légèrement, puis elle leva les yeux dans ceux de Jared. Que répondre à cela? Etait-ce dit consciemment ou pas? Pensait-il vraiment que...? Cessant alors de se poser des questions, elle se dit avec dépit que peut-être cette phrase n'avait aucun sous-entendu, que c'était juste une tirade qu'il avait envie de dire en passant. Cependant, c'était se mentir à elle-même que ne pas répondre comme il le fallait.

"Dans les contes de fées, j'ai toujours aimé les méchants, répondit-elle très sérieusement. Bien que le crapaud ne m'attire pas vraiment, le cavalier noir a toujours été sujet d'admiration et d'attirance chez moi."

Voilà. Elle avait répondu, sans trop en dire. S'il avait des idées dans l'esprit en lui disant cela, alors il aurait une réponse ensevelie qu'il comprendrait - sinon il ne verrait pas le sous-entendu et la soirée continuerait de même. Elle ne pouvait pas se permettre des erreurs d'interprétation qui créeraient une gêne trop notable dans la discussion, c'est pour ça qu'elle insinuait ses émotions tout en douceur. Pour ne pas qu'il comprenne trop vite? Non. Pour ne pas qu'il parte, la laissant abandonnée face à sa vie. Besoin de lui. Peut-être.

Invité

Néophite… Inconscient… Jared avait l’illusion que ses jeux rhétoriques servaient simplement à nourrir la conversation, à la rendre attractive pour un esprit tel que Topaze. Il ne cernait pas la gêne qui parcourait de temps à autre la jeune femme. Depuis fort longtemps, son esprit s’était fermé à toute forme de sentiment humain autres que la haine, le désespoir. Oublier l’essentiel des sentiments humains… La force qui pousse chacun d’entre eux à continuer inlassablement le cours de sa maigre vie. Il était au départ d’une allée emplie de dédales, et se sentait incapable de franchir ne serait-ce que la première porte. Au point qu’il ne se posait plus de questions sur l’existence elle même. Seule Topaze, lors de leur première rencontre, avait eu l’effet d’un électrochoc, lorsqu’elle l’avait incité à en dire un peu plus sur des sujets qui étaient devenus tabous dans son esprit, car trop dangereux. Peut être était-ce pour ça qu’il se débloquait légèrement face à elle… Il n’aurait pas su le dire avec certitude…
A l’entente des mots "contes de fées", son attention augmenta, et il posa un regard emplit de perplexité sur le visage de Topaze. Il avait toujours vu ces récits comme des fables destinées à noyer les êtres émotifs dans des histoires qu’ils ne vivraient jamais. Vision très pessimiste, mais qui devait receler un minimum de vérité. Il ne faisait pas le rapprochement entre lui et le personnage énoncé par Topaze. Par niaiserie ? Non, par volonté de se voiler la face. Jared ne voulait pas ressembler à quoi que ce soit de stéréotypé, ne voulait pas faire l’objet d’une quelconque comparaison, et plus que tout, ne voulait pas avoir de l’importance auprès de qui que ce soit. C’était trop dangereux… Et cela l’amènerait à sa perte, comme celle de la personne en question. Du moins, c’était ce qu’il pensait, au fond de lui même. Aussi, il resta terre à terre, ne voyant que l’aspect pratique de la dernière tirade de Topaze, le conte de fées en lui même. Il prit la parole, toujours avec l’once de moquerie qui l’habitait ce soir, de manière éphémère…

"Les méchants… Existent ils vraiment ? Pensez vous que le monde est simplement blanc et noir ? C’est une vision très manichéenne, à mon humble avis…"

Inconsciemment, il tentait de se disculper d’appartenir à la seconde catégorie. Topaze avait mentionné le fait qu’il n’était pas un Saint-Esprit, et il ne pouvait nier qu’elle avait raison. Mais une fois de plus, il se sentait trop vite agressé, trop vite considéré comme ce qu’il ne voulait pas être, d’une force peu qualifiable. Il se rembrunit quelques instants, et plongea de nouveau son regard dans l’eau, bousculée par de petites éclaboussures, dues à l’action de la fontaine elle même. Une analogie morbide s’imposa aussitôt à son esprit, et il vit les gouttes d’eau se transformer en êtres humains, tombant inéluctablement dans un cours d’eau qui les noierait à coup sûr. Ils possédaient tous un bandage, sur lequel était visible la trace d’une fine rayure de sang… Une griffure…
Jared revint subitement à la réalité, et sursauta sans pouvoir contrôler quoi que ce soit. Les yeux effarouchés, il scruta l’horizon, à la recherche de l’oracle qui venait de lui faire subir ce traitement. Evidemment, il ne vit rien, et eut un frisson de peur. La peur de ne pas être maître de son destin, la peur de voir l’irrémédiable se réaliser un jour ou l’autre. Oui, il était un danger public, et sa présence même en ces lieux, la nuit, seul avec une personne qui semblait lui accorder sa confiance, tenait du masochisme le plus profond. Il voulait se lever, partir sur le champ, oublier cette soirée et la soudaine bonne humeur qui l’avait assailli, sans qu’il puisse comprendre quelle en était la source profonde. Panique… Celle qui fait perdre tout sens commun…
Pris de court par ses propres illusions, le jeune homme se leva et s’agenouilla aux pieds de Topaze, avant de saisir ses mains, et de les tenir comme si elles seules pouvaient le guérir de sa tare. Puis, il se mit à pleurer, avec désespoir, avant de prendre la parole, hoquetant…

"Topaze, souvenez vous de ce que vous m’avez dit, lors de notre première rencontre. Vous souffriez de ne pas pouvoir sauver l’humanité, de devoir abandonner des centaines de personnes à la mort… Je vous avais dit de relativiser, car vous étiez impuissante… Mais que dois-je faire, sachant que non seulement je ne peux pas les sauver, mais qu’en plus de tout cela je représente un danger hors du commun, pour tout être humain ?"

Il en avait trop dit, et le réalisa sur le coup. Des justifications… Il devrait en donner, forcément, mais ne le voulait pas. Il perdrait la seule personne qui l’avait compris, et se retrouverait à nouveau seul dans sa dépendance au tue loup, à l’enfermement psychologique, et à la routine dévastatrice… Etrange… C’était la première fois que le jeune homme s’abandonnait au désespoir en public, si l’on puit considérer que Topaze en incarnait un. Il resserra sa prise sur les mains de la jeune femme, dans un sanglot, et ferma les yeux. Il voulait oublier… Oublier le destin qui lui courait après depuis toujours, sans qu’il puisse le contrer… Comme quoi, une évocation dénuée de méchanceté suffisait à déstabiliser clairement les personnes réputées totalement imperméables…

Invité

Stupeur. Restant immobile quelques instants, Topaze comprit avec une tristesse dissimulée que Jared n'avait pas les mêmes idées qu'elle, car il répondit par une tirade philosophique - il n'avait donc pas saisi le message qu'elle avait cherché à lui faire passer. Avec une mine emplie d'un sentiment qu'encore elle n'avait jamais connu, une tristesse qui s'intensifiait, un espoir qui s'éloignait lentement, elle tourna elle aussi son regard vers l'eau, sans répondre à la remarque de Jared. Non, elle ne pensait pas que le monde était blanc ou noir - elle ne croyait pas à une dichotomie simpliste. Au contraire, elle savait apprécier les nuances du coucher de soleil, et les mille sensations qu'elle pouvait ressentir au fil d'un instant seulement - mais comment expliquer cela, alors qu'elle sentait son coeur se tordre? Paranoïa. Depuis les remarques qu'on lui avait faites en dernière année à Poudlard, quand elle jouait avec les garçons sans leur accorder la moindre importance, elle ne s'était pas renfermée. Toujours heureuse, le sourire aux lèvres, elle en avait séduit plus d'un en un clin d'oeil, et tous l'avaient déçu. Justement par ces conquêtes trop rapides, par ces désirs élancés dans des mots cavaliers. Ce n'était pas ce qu'elle souhaitait. Posant son regard sur Jared, elle savait que c'était exactement ce genre d'hommes qu'elle voulait. Lui. Mais il fallait bien qu'un jour on la repoussât. Pour la première fois. Tournant son regard vers le ciel, elle poussa un très long soupir, avant de se tourner, lentement, vers Jared. Ses yeux noirs étaient portés vers l'eau, son visage émacié était contracté, pris d'une angoisse et d'émotions palpables. Elle ne cherchait même plus à savoir ce qu'elle aurait pu dire de mal, car ce n'était pas une question qui se posait, ni des excuses qu'elle pourrait formuler. Pas maintenant.

*Délivrance ~ Que faire, maintenant? Lui sourire et m'en aller? Feindre la joie et continuer à discuter? Ou bien oublier mes sentiments et sourire franchement?*

Désemparée, elle n'avait jamais fait face à ce genre de moments, ne savait pas comment les prendre, comment les recevoir.
Sursaut ! Jared s'était agenouillée, soudain, et les yeux de Topaze s'écarquillèrent d'étonnement. Que faisait-il? Il lui prit les mains, et pleura - le premier sanglot produit un déchirement chez la jeune femme et ceux qui suivirent la laissèrent immobile, silence, sans savoir quelle attitude adopter. Elle n'aurait jamais cru qu'il pourrait abaisser ainsi sa fierté de manière à s'agenouiller devant elle et à verser de vraies larmes sur des problèmes qu'il ressentait. Il lui parlait, vraiment. De ses souffrances. Muette, elle finit par se racler la gorge, et s'agenouillant aussi, face à lui, elle alla lui parler à l'oreille, lui posant la main contre la joue pour qu'il se calmât.

Délivrance ~ Un danger hors du commun, Jared? demanda-t-elle sans comprendre. Pourquoi? Avez-vous peur des émotions, et des contacts? Laissez-vous aller. Relativisez, et... cessez de penser que vous êtes le seul à douter de vous. Car ce n'est pas le cas.

Reculant légèrement, elle plongea son regard dans le sien, encore une fois. Une fois de trop peut-être. Mais jamais deux sans trois, n'est-ce pas. Comptine d'enfant qui prenait beaucoup de sens avec le temps, comme beaucoup d'autres proverbes qui se révélaient amusants et en fait terriblement présents dans la vie. Il parlait de ses souffrances. Elle tentait de l'aider. Mais se sentait impuissante. Oui, elle aurait aimé relativiser elle aussi. ... Sentant le souffle irrégulier de Jared elle sentit son ventre se nouer, mais laissa ses yeux bleus dans l'océan noir du regard de son interlocuteur. Dreamin'.

Invité

Se laisser aller. Jared était en total abandon de lui même, et n’était plus maître de ses actes. Cependant, son esprit était clair, certainement plus qu’il ne l’avait jamais été. Face à un mur, Jared exacerbait ses sens, et trouvait toujours le moyen de rebondir, quoi qu’il arrive. C’est ce qui faisait sa force, mais aussi sa faiblesse. A force de rebondir, l’être humain s’essouffle, et finit par sombrer, sans aucune chance de retour apparente. Et pourtant, il continue d’espérer, de croire en une vie meilleure, où ses rêves seraient réalité, et où les tracas deviendraient futiles au point de les mettre de côté. Jared se leurrait en prônant ne plus croire en rien, il le réalisait au fur et à mesure que les secondes près de Topaze passaient. Il ne concevait pas qu’elle puisse partir, effrayée par sa nature profonde. Plus qu’autre chose, c’est cela qui lui faisait pleurer toutes les larmes de son corps. Il n’était plus qu’un corps dénué de vivacité, tout juste apte à se morfondre sur son sort. Il se haïssait… Il haïssait sa pudeur maladive, mais aussi son exhibitionnisme, comme actuellement. La honte… Elle prenait Jared, et l’enserrait dans un malaise qui ne cessait de s’accentuer. Il était au comble de la saturation lorsque Topaze posa l’une de ses mains sur sa joue, et lui murmura quelques paroles à l’oreille. Ces paroles agirent automatiquement sur le jeune homme, comme un baume apaisant, et lui permirent de retrouver un semblant de stabilité. Il écouta avec attention, et ne bougea pas d’un centimètre. Il lui semblait que ce moment, éphémère au possible, pourrait être brisé par un simple mouvement de cil. Il fallait qu’il en préserve la durée coûte que coûte.
Une étrange réalité s’imposa alors à l’esprit du jeune homme. Pourquoi se montrait il si réceptif aux actes de Topaze ? Pourquoi avait il une peur maladive de la perdre ? Il lui suffisait de poser un simple mot, et il aurait la réponse à ses interrogations…
Il allait poser le doigt sur ce concept, évident, lorsqu’un élan de peur irraisonnée le prit. Non, il ne pouvait éprouver un tel sentiment, il se l’était juré. Sa vie, et celle de dizaines de personnes en dépendait. L’enjeu était trop grand.
Pourtant, il ne détourna pas la tête, ne prit pas la fuite, et se prit à regarder Topaze avec autant d’intensité qu’elle le faisait, au même moment. Et s’il n’était pas le seul à se torturer l’esprit ? Si toutes ses interrogations, ses refus intempestifs, ne rimaient à rien ? Mystère de l’esprit humain…
Jared ne pu plus retenir ses mots, et prit la parole, dans un murmure tout juste audible…

"Le doute… Il nous ronge tous… Mais, plus que toute chose, c’est la peur de l’échec qui nous effraie… Je n’ai plus peur de mes émotions… Plus avec toi…"

Le tutoiement… Jared ne supportait plus de devoir jouer un double jeu. Celui du respect lointain, qui sonnait amplement faux, et celui, plus pressant de minutes en minutes, de l’approche contenue. Il voulait que Topaze comprenne à quel point elle l’avait obnubilé durant ces quelques jours, sans qu’il ait la présence d’esprit de le remarquer au moment même. Il désirait briser les barrières de la raison, qui l’assaillaient depuis trop longtemps. En un mot, il voulait vivre…
Vitalisé par cette conviction, il leva l’une de ses mains, essuya les larmes qui coulaient le long de ses joues, et saisit avec douceur la main de Topaze, restée sur sa joue. Il la serra entre ses doigts, tout en gardant les yeux sur la jeune femme. Le silence avait succédé à ses derniers propos, et il commençait à se faire pressent, presque gênant.
Sans se laisser le temps de la réflexion, Jared fit ce qu’il n’aurait jamais imaginé être capable d’effectuer, ne serait-ce que quelques minutes auparavant. Il approcha son visage de celui de Topaze, et posa ses lèvres sur les siennes, dans une manifestation d’amour platonique. Il l’embrassa sans agressivité, et, de sa main libre, lui caressa les cheveux.
Il attendait tout et rien, il espérait l’improbable comme le réalisable, et le tout sans se monter l’esprit. Un seul visage lui revenait à l’esprit, celui de Topaze… Le reste n’importait plus…

Invité

Etincelles. Etait-ce un feu d'artifice dans le ciel qui produisait de tels battements ou était-ce simplement le coeur de Topaze? Les yeux entrouverts, elle sentait que le moment était d'une intensité sans pareille, et agenouillée si proche de Jared, elle comprenait l'importance de cette seconde. L'instant de vérité, en quelque sorte. Il la regardait, la dévisageait en réfléchissant sûrement à mille détails, et elle sentait des vagues d'émotions qui naissaient en lui, disparaissaient, et revenaient avec plus d'ampleur encore. Quand enfin il répondit à ses mots, elle se contracta une seconde, car c'était seulement alors qu'elle saurait - enfin. Le début de la phrase était un bon présage, mais elle ne voulait avoir de désillusion ; aussi, elle tenta de ne croire à rien. Cependant, quand il finit sa tirade, elle sentit que son être tout entier était pris par une euphorie éphémère, un instant de bonheur si intense qu'elle le ressentait au plus profond d'elle-même. Elle n'osait encore y croire - croire à ces quelques mots qui avaient tout changé et qui la changeaient à jamais. Encore dix jours auparavant, avant sa rencontre avec Jared, elle n'aurait jamais pu imaginer les émotions qui l'envahissaient. Il séchait ses larmes, les repoussant comme la raison et la solitude qui l'avaient exclu trop longtemps de bonheurs qu'il croyait faux et mauvais pour lui. Maintenant, il osait avoir la foi, et cela - disait-il - grâce à elle. Elle n'aurait pu espérer plus beau cadeau, et leurs mains enlacées laissaient comprendre le sentiment qui les envahissaient, et sur lequel il ne mettait pourtant pas encore de nom. Sourire. Elle avait envie de pleurer - de soulagement, de bonheur. Mais elle se contenta de savourer le contact qu'elle avait tant souhaité - pendant cette semaine, elle n'avait rêvé que d'un moment comme cela, et enfin elle le frôlait, elle s'en approchait. Un rêve.

Impossible. Et pourtant vrai. Quand il s'approcha d'elle, elle réalisa que ce n'était pas des songes, qu'elle vivait vraiment, et qu'ils étaient si près l'un de l'autre que...
Souffle coupé. Tandis que la main de Jared lui caressait les cheveux, leurs lèvres, enfin, s'étaient touchées. Lui & Elle. Comment aurait-on pu imaginer telle relation, telle union? C'était peut-être invraisemblable et pourtant aucun des deux n'avaient jamais ressenti tel bonheur, sincère jusqu'à la plus profonde parcelle de leur être. Jamais un baiser ne lui avait procuré une telle émotion, et elle frôla le visage de Jared du doigt avant de poser sa main sur sa nuque. Euphorie. Amour? Peut-être. Sûrement. Elle cessa d'embrasser celui qui comptait tant maintenant pour elle et recula légèrement savourant du silence pour vérifier que c'était la réalité, la vraie - son histoire, son expérience qui devenait colorée. Mille nuances qu'elle n'avait pu vraiment apprécier avant.

"Ne m'abandonne pas, souffla-t-elle à l'oreille de Jared, sa main toujours contre sa nuque."

Invité

Irréalisme… Jared pouvait voir sa raison lui tendre les bras, à quelques pas de lui. Pourtant, il ne l’attrapait, pas, et tentait de la repousser, du mieux qu’il pouvait. Il réfutait toute appartenance au camp des sous hommes, et désirait appartenir, enfin, à la classe de la « normalité », si tenter qu’elle existe. Il s’accrochait à ce désir, profond, comme il s’accrochait à son amour, enfin déclaré, pour Topaze. Désormais, le jeune homme avait un but… Un but qui se muait de secondes en secondes en une certitude implacable. Il avait accepté d’avoir le devenir de quelqu’un sur la conscience, et sentait une paire de menottes invisibles lui enserrer les poignets. Etrangement, cela le fascinait, et ne faisait que le conforter dans l’abandon total de lui même. Une cassure de l’esprit inéluctable venait de s’opérer, qui ne tolèrerait pas de retour en arrière. Si tenter qu’un tel retour soit désiré.
Stop ! Jared ne voulait plus imaginer le pire comme le meilleur, et désirait bannir le doute, la contradiction, de son langage. S’il n’y arrivait pas… il perdrait Topaze, comme il avait perdu toute sociabilité. Et ce serait l’aboutissement d’une déchéance fatale, débutée il y a déjà longtemps.
Un échange, un simple regard sur la femme dont il serrait toujours une main… Jared n’oublierait pas ce moment…
Une expression… Celle du doute et de la peur… Mais pas chez lui, cette fois ci. La peur de l’abandon, de la déchéance sans prises… Un cœur fendu… Comment Topaze pouvait elle imaginer qu’il la laisserait ? C’était un reflet, un reflet de l’apparence que donnait le jeune homme, en société. Il n’accordait de l’importance à rien, que ce soit matériel ou humain.
Subitement, il réalisa. Topaze ne lui donnait pas qu’une marque éphémère d’attention. Elle lui vouait son cœur, et abandonnait son indépendance envers la société. Tout ceci pour un menteur… Un menteur chronique, chez qui la vérité était presque inexistante. Continuerait il sur cette voie ? Prendrait il le risque de précipiter Topaze à sa perte ?
Enfin… Jared rattrapa sa raison, et sentit plus fortement le contact de la main de Topaze sur sa nuque. Il fallait qu’il lui dise… Ou qu’il l’abandonne maintenant, tant qu’il n’était pas trop tard. Son visage se referma instantanément. Non, il ne pouvait pas lui dire la vérité… C’est elle qui l’abandonnerait, le cas échéant. Il se perdait, et sentait la folie de la contradiction le prendre à nouveau.
Un rayon… La lune. Jared sentit un frisson le parcourir de haut en bas, comme chaque fois qu’il s’exposait en période de non dangerosité, à l’astre opalescent. Une frayeur incontrôlée.

Topaze ! Jared se força à ramener son regard sur elle, réalisant que son silence propre ne pouvait que semer les germes d’une déception féroce. Il se fit souriant, et la prit dans ses bras, avec toute la douceur qu’il était capable de donner. Il ne devait pas aller trop loin, pour cette fois, car il n‘était plus totalement maître de ses émotions. Calme… Dans un chuchotement, il répondit à la jeune femme…

"Je serai là pour toi… En toutes circonstances… Je t’en supplie, accorde moi ta confiance…"

La confiance… Encore une fois, le jeune homme se contredisait. Il demandait la confiance de Topaze, mais était encore et toujours incapable de donner la sienne. Peu importait… Il voulait abaisser les barrières entre eux. Attendant une réaction, quelle qu’elle soit, le jeune homme embrassa le front de la seule personne qui avait brisé sa coquille, depuis longtemps, couvrant ainsi les yeux bleus ciel d’une onde de cheveux d’ébènes…

Invité

Amour. Mot employé dans les contes et les mythologies avec fureur. Principale caractéristique et préoccupation de l'être humain, qui cherche son âme soeur aux quatre coins du monde, avant de remarquer qu'elle était là - sous ses yeux. Que mille fois déjà dans sa quête éperdue, il aurait pu la prendre dans ses bras - mais parfois celui qu'on croit être l'âme soeur ne l'est pas, c'est alors une souffrance indicible et difficilement curable. Topaze voulait croire à l'amour durable, à celui qui changerait sa vie, et en sentant le souffle chaud de Jared contre sa joue, elle y croyait - elle y mettait sa foi et son énergie. Silence. Il ne répondait pas à sa demande, se taisait implacablement, et elle sentit les battements de son coeur s'accélérer nerveusement - ne se servirait-il d'elle que pour une passe? Non, ce n'était pas son genre. Ce n'était pas un homme qui faisait semblant, qui mentait pour avoir une femme. En tout cas, c'est ce qu'elle voulait croire, les yeux entrouverts, elle conjurait le ciel de ne pas avoir donné son affection trop naïvement au premier infidèle venu - enfin il parla. Il lui demandait sa confiance. Inquiète, elle cherchait ce qui pouvait bien le troubler ainsi, et relâcha son étreinte, avant de se lever tout à fait, pour s'appuyer de nouveau contre la fontaine. Elle voulait réfléchir - penser à ce qu'elle faisait. Mais son coeur qui battait toujours la chamade ne lui laissait aucun répit - elle sentait l'appel incessant et omniprésent de celui qui comptait tant pour elle. Aussi, elle le fit se relever, en lui prenant la main, et lui répondit par un souffle, ses yeux bleus vers ses cheveux ébène qu'elle voulait de nouveau caresser sans complexes.

Délivrance ~ Je te l'accorde, Jared - ne me trahis pas, je t'en conjure. Parle-moi et confie-moi tes craintes, mais ne fuis pas. Je serai auprès de toi pour toujours si tu m'en donnes l'opportunité.

La Lune. Un rayon se posa sur eux, puis disparut peu de temps après - elle avait cependant perçu la lueur inquiète dans le regard de Jared. Les yeux de Topaze s'écarquillèrent lentement, et elle pensait avoir compris. Frisson. Elle mit une certaine forme d'insistance dans son regard - elle fixait Jared en cherchant un réconfort dans son apparence. Croire au bonheur? Elle essayait mais déjà des obstacles les assaillaient comme voulant les empêcher d'y accéder - pourtant si proche de Jared, si elle se laissait aller, elle pouvait entrevoir les émotions qu'il lui procurait malgré tout. Malgré la vérité.

Délivrance ~ Jared. Es-tu...

Elle ne finit pas sa phrase, détournant le regard vers la lune, en priant pour qu'il comprît - elle n'arriverait pas à prononcer le mot de l'espèce qu'était Jared, et qui le condamnait à un malheur ostensible. Il devenait un danger hors du commun à chaque pleine lune, mais il prenait sûrement la potion tue-loup. Sourire. Elle avait oublié ce remède : peut-être alors la foi pourrait renaître.

Délivrance ~ On va marcher, viens. Raconte-moi. Dis-moi qui tu es...

Invité

Le réconfort. Il semblait à Jared que ses pires craintes s’effaçaient à jamais. Pourtant, il se dédoublait de plus en plus, et sentait de secondes en secondes un piège se refermer contre lui. Le piège de la sincérité, du partage de toute chose. Le choc était brutal, éphémère, et enlevait tout esprit critique au jeune homme. Lui qui s’était toujours pensé au dessus des sentiments d’une société inconciliable avec lui, se voyait sombrer dans les bras d’une inconnue. Une inconnue… oui, après tout, ils ne s’étaient vus que deux fois… Et cela avait suffit… Jared ne s’expliquerait certainement jamais un tel comportement, quoi qu’il advienne par la suite. Une seule chose était certaine. Il avait l’étrange impression de connaître la personnalité de Topaze, jusque dans ses plus infimes détails. Evidemment, cette impression était fausse, mais Jared ne l’apprendrait qu’au fil du temps, après avoir longuement médité sur ses actes… Il ne lui manquait plus que sa confiance, qu’il désirait ardemment, sans savoir réellement pourquoi. Pourquoi ?… Tout simplement parce qu’elle est nécessaire à la mise en place d’une connivence profonde, entre deux personnes…
Ca y était… Topaze venait de lui accorder sa confiance, du moins officiellement… C’était tout, et rien à la fois, des paroles en l’air, comme une sentence irrévocable. Jared se décrispa automatiquement, par soulagement profond. Les barrières premières venaient d’être brisées dans leur totalité. Restaient les barrières profondes, celles qui étaient depuis longtemps cadenacées chez Jared…

Une amorce de question… Si insignifiante, hors contexte ! Et pourtant tellement effrayante pour Jared… Un regard sur la lune, sa compagne perpétuelle… Non… Topaze ne pouvait pas avoir compris… Elle ne devait pas… Tout le rêve s’effritait sous les yeux du jeune homme, et la noirceur du paysage qui l’entourait le saisissait à nouveau. Il était trop changeant, trop peu réaliste. C’était sa faiblesse principale…
Marcher… Qui était il ? Ou plutôt qu’était il ?… Un être bestial, une horreur de la nature, tout juste bon à semer désespoir et souffrance dans un monde qui ne désirait que la paix. Un animal de l’ombre… Cette vérité éclata dans le cerveau de Jared au moment même où il se levait, et entamait une marche emplie de silence, avec Topaze. Il avait été stupide, une fois de plus… Pourquoi s’acharner sur un malade, alors que l’on sait pertinemment qu’il est un cas désespéré ? De même, pourquoi désirer le bonheur d’autrui, lorsque l’on sait que c’est impossible ?
Le silence succéda au silence, et emplit la scène d’une atmosphère peu propice aux confidences. Jared ne pouvait pas étaler sa condition au grand jour. C’était trop dangereux, pour lui, pour Topaze, pour la société en elle même. Il ne doutait pas de la capacité de la jeune femme à maintenir le secret, mais n’importe quel cas de figure pourrait tout gâcher. Sa décision était irrévocable… Le visage fermé, Jared se décida enfin à prendre la parole. Sa voix s’était faite caverneuse, comme forcée à s’exprimer. Il ne regarda pas Topaze, durant l’intervalle de temps qui suivit, et fixa le sol…

"Je suis moi même, simplement. Affranchi d’une société que je ne désire pas comprendre, et qui ne désire pas me comprendre. Je n’incarne rien de dangereux, seules les apparences sont trompeuses. Les apparences… Elles régissent tout…
Peut être ais-je un problème de communication ?… J’avoue ne jamais m’être posé la question… Nous sommes tous uniques, à des degrés d’intensité différents…
J’ai eu été sociable… A une époque révolue depuis fort longtemps. Mais la sociabilité ne m’a rien amené de positif. Je suis bien plus épanoui aujourd’hui, sois en certaine…"

Revigoré par la finitude de ses propos, Jared releva la tête avec vitalité, et plongea son regard dans celui de Topaze, avant de continuer sur sa lancée, perplexe…

"Quels sont tes doutes, Topaze ?"

Il ne voulait pas qu’elle lui cache quoi que ce soit. Et pourtant, il s’était fait maître en mensonges, à un point qu’il n’avait jamais cru possible. Il voulait la rassurer, lui permettre d’oublier ses peurs, l’espace d’un instant. Et là était toute la contradiction… Si Topaze adhérait au mensonge, la retombée sur terre n’en serait que plus dure. Mais Jared ne voyait pas le long terme, et ne préférait pas s’imaginer quoi que ce soit. Il avait toujours vécu au jour le jour, et ne changerait pas en un claquement de doigts. Il en était de même pour son naturel mystérieux. Il ne dévoilerait rien sans y être contraint. Sa nature profonde le lui interdisait. Même si cela devait le mener à sa perte, ou celle d’un être cher…

Invité

Innocence. Topaze voulait croire au bonheur, et avoir confiance en Jared, pouvoir sentir un fil de sincérité dans leurs tirades, être en sécurité avec lui, en fait. S'il ne remarquait pas son regard vers la Lune, et s'il ne voyait pas l'allusion, alors peut-être tout simplement s'était-elle trompé. A peine avait-elle effleuré cette théorie que son sourire revînt, beau et triomphant, balayant de cette éclaircie le souci qui s'était un instant seulement posé sur son visage. Maintenant, ses traits étaient de nouveau lisses, et sa peau douce s'était unifiée sous les rayons faibles de la Lune. Le coeur en bandoulière, elle se sentait libre et heureuse, tenant le bras de celui qu'elle avait tant désiré pendant cette semaine, et qui maintenant la considérait aussi comme un être cher, indispensable peut-être. L'âme réjouie et les soupçons envolés, elle prit plaisir à cette brève balade - les lampadaires brillaient d'une lueur jaunâtre au-dessus des pavés, et les maisons s'alignaient à droite et à gauche. Tel un rêve, tout semblait se passer terriblement vite - à peine avait-elle le temps de réaliser ses émotions que déjà ils s'étaient embrassés, puis étaient partis, selon son propre souhait. Etait-ce une idylle, était-ce le début d'un cauchemar? Topaze n'envisageait peut-être pas tout à fait encore l'importance phénoménale de ses actes et de ses propos - elle ne se doutait aucunement des mensonges de Jared, qu'il déclarait pour les préserver, sûrement. Pourquoi ne creusait-elle pas, pourquoi ne tentait-elle pas de scruter dans le regard de Jared? Parce qu'elle lui faisait déjà confiance.

Délivrance ~ Des doutes qui n'étaient pas fondés. Et je pense qu'en effet tu as un épanouissement satisfaisant et même exceptionnel, qui m'a charmée dès notre premier abord. Il faut dire que tu as des apparences qui peuvent inquiéter, mais ce n'est pas mon genre de m'arrêter à la vue de quelqu'un. Surtout quand elle n'est pas si mauvaise !

Avec un clin d'oeil, elle sourit à Jared, le désir de le serrer contre elle la reprenant - se contenant cependant, elle tentait de rester détachée et de savoir savourer chaque moment avec lui. Etre précipitée le ferait fuir, c'est quelque chose qu'elle se disait depuis le début de la soirée, même si elle essayait de passer outre et d'agir avec la liberté accoutumée. Alors, elle était peut-être un peu nerveuse, peut-être ses gestes étaient quelques peu forcés ou au contraire dissimulés - mais tout cela faisait partie de ses pensées et de ses états d'âme. Elle voulait lui plaire, et devenait anti-naturelle.

Délivrance ~ Ahem. Tu as déjà dîné?

Elle-même n'avait pas encore mangé, et sentait la faim commencer à lui tirailler le ventre, même si elle tentait de ne pas y faire attention depuis une quinzaine de minutes. Respirant calmement, elle s'appuyait avec tendresse sur le bras de Jared, passant déjà en revue les multiples options de restaurants qu'elle connaissait à Pré-au-Lard. La brise lui semblait avenante, les volets entrouverts promesses de bonheur, même le ciel noir encre paraissait lui sourire - comme quoi la joie peut tr_s vite envahir un monde et un regard. Sourire.

Invité

Crédulité de l’être humain. Jared ne réaliserait jamais pleinement sa chance. Non seulement il était cru, mais en plus de cela, il n’avait pas besoin de faire d’efforts pour y parvenir. Un tel comportement de la part d’un être humain était complètement à l’opposée de ce que Jared connaissait de manière générale. Etat de faits agréable, mais que Jared ne pouvait pas s’empêcher de trouver malsain, car obtenu par le mensonge. Au fond de lui même, le jeune homme se haïssait de n’avoir pas eu la volonté, le courage, de tout avouer. Mais la peur de la déchéance irrévocable l’effrayait encore plus que le mensonge, et c’était compréhensible, d’une certaine manière. Il lui fallait relativiser… Il aurait tout le temps de méditer sur la conduite à tenir, et devait saisir l’instant présent comme s’il était le dernier en compagnie de Topaze. Triste contradiction, lui qui avait toujours vu la sentimentalité en général comme la manifestation la plus pure de la stupidité humaine, se trouvait pris entre les mailles d’un filet invisible, qu’il ne désirait pas quitter le moins du monde. Ainsi, une sagesse nouvelle s’emparait de l’esprit du jeune homme, et un élan d’humilité l’envahit subitement. Il ne regarderait plus jamais ses patients et leur famille de la même manière. Il tolèrerait les pleurs, le désespoir, mais ne serait pas capable de tenter d’y remédier. Etait-ce un progrès ou une regression ? L’ancien Jared prônerait la deuxième option… Triste ignorance, dépit, qui s’était transformé en un dégoût profond, au fil du temps. Il était temps d’évoluer…
Un sourire… Une gène évidente dans le ton… La faible contradiction qui se manifesta inopinément chez Topaze ne manqua pas de faire réagir Jared. Il connaissait trop bien les tréfonds de l’esprit humain pour ne pas en cerner les changements les plus ostentatoires… Manger… La futilité de la question abasourdit le jeune homme, qui resta coit quelques instants. Il n’était pas dans les habitudes de Topaze de raisonner ainsi… Il ne s’était donc pas trompé sur les sentiments contradictoires qui assaillaient la jeune femme. Il restait à les analyser, afin de les comprendre. Le guérisseur reprenait le dessus, encore une fois, mais avec une once supplémentaire de tendresse. Il n’avait pas de responçabilité, simplement la préoccupation du bien être de Topaze. Tout d’abord alarmé, le jeune homme se détendit ostensiblement lorsqu’il aperçut le sourire qui illuminait le visage de la jeune femme. Elle s’appuyait sur son bras, avec peut être un peu plus de fermeté qu’auparavant. Jared devrait encore beaucoup apprendre à cerner les appels implicites voire inconscients des êtres humains.
Il lui fallait suivre les désirs de Topaze, et ce pour ne pas briser le charme qui s’opérait sur eux. Aussi, le jeune homme s’arrêta, une fois que Topaze eut manifesté l’envie d’aller se restaurer. Il ne s’était absolument pas préoccupé de cela, restant totalement centré sur lui même jusqu’à présent. Un bref haussement de sourcils, et il se mit à l’écoute totale de la jeune femme. L’entourant de ses bras, il lui murmura quelques paroles, non dénuées d’espièglerie, à l’oreille…

"Je ne dîne que très rarement… Où veux tu m’emmener, princesse ?"

Sur ces mots, le jeune homme enfouit sa tête dans le creux de l’épaule de Topaze, et attendit qu’elle prenne une décision, décision qui ne tarderait pas, il en était persuadé. Il était prêt à la suivre n’importe où, ce soir, quitte à figurer en tant qu’absent dans les registres de Sainte-Mangouste, le lendemain. Il avait besoin de ce bol d’air pur, et sacrifierait tout pour ne pas en être privé. Il transplanerait avec elle, sur le champ, si elle le lui demandait…

Invité

Extase. Topaze avait peut-être fait le bon choix en décidant de ne pas se focaliser sur les doutes qu'elle avait eu, peut-être allait-ce préserver leur soirée qui se déroulerait dans le calme joyeux d'un amour naissant. Sans se douter de l'histoire que Jared cachait, elle réagissait maintenant avec plus de spontanéité, et une certaine franchise aimable et emplie de fraîcheur. Redevenue naturelle, elle ne sentait que maintenant la faim lui emplir les pensées, et le sourire de Jared était devenu pour elle presque le centre du monde - en tout cas, elle le cherchait sans cesse. Comme si le voir heureux la rassurait - étrangement, chaque manifestation du bonheur de l'autre la rendait elle-même sincèrement contente. Quand il accepta sans plus de difficultés le dîner, elle se dit que peut-être lui n'avait pas envie, ou n'avait même pas pensé à manger - aussi, elle réfléchit un instant, puis se détendit de nouveau. Puisqu'il lui laissait le choix de l'endroit, elle en profiterait, évidemment. Son beau sourire s'élargit lentement, tels les cycles lunaires, qui font grandir et s'allonger l'astre. Avec une pointe d'hésitation, elle se dit qu'après tout, pourquoi pas. Oui, évidemment, il serait peut-être gêné, et bien sûr ce serait peut-être étrange - mais elle y pensait, de plus en plus : et s'ils allaient tous deux..?
Doute & Réflexion. Et s'il prenait cela comme des avances trop calculées, s'il prenait soudain la mouche et prétextait un rendez-vous pour s'enfuir sans un regard en arrière? Elle décida que lui proposer un choix était tout de même plus raisonnable, tout en souhaitant qu'il ne fût pas gêné par la proposition qui lui tenait à coeur.

Délivrance ~ On pourrait aller dîner dans un restaurant par-ici. Ou bien. Je ne sais pas... A Poudlard, j'ai un appartement - pas aussi spacieux que je ne pourrais l'espérer mais agréable tout de même. Et j'ai le droit d'y amener qui je souhaite ! .. Mais peut-être ça ne te paraît pas aussi bien qu'un restaurant. Bref.

De la main droite, elle tenait Jared avec un soupçon de joie - mais de la main gauche, elle se tortillait une mèche, cherchant le juste milieu, et comment annoncer sans hésitations apparentes son envie de lui montrer chez elle. Oui, son apparement n'était peut-être pas le plus beau, le plus impressionnant - mais elle savait comment se procurer de la nourriture. En effet, les elfes de maison se relayaient à la cuisine pour subvenir aux besoins des insomniaques en manque de nourriture : ainsi, ils pourraient venir chercher de quoi dîner et remonter dans ses appartements. Alors, ils pourraient parler - de leur vie, peut-être. Apprendre à mieux se connaître. Se livrer d'une certaine manière, pour ne pas s'unir sans découvrir l'autre. Avec un sourire, elle tentait de ne pas laisser trop voir toutes ces pensées qui tendaient vers le choix de Jared. Silence.

HJ : Je suis vraiment désolée de faire des RP's aussi courts en ce moment, je ne sais pas ce qui m'arrive - peut-être en panne d'inspi'. Ca ne m'arrive jamais. Bref. J'essaie d'introduire un nouveau tournant chez les tourtereaux.

Invité

HJ : Nous avons tous des passes d’inspiration. Je ne suis pas gênée le moins du monde, ne culpabilise pas Wink

.

Les désirs implicites. Bien qu’apte à les comprendre, Jared avait toujours fait en sorte de n’y prêter qu’une oreille évasive, complètement désintéressée. Le ressenti d’autrui ne l’avait jamais préoccupé, de sorte qu’une telle réaction était devenue un réflexe des plus basiques, qui renforçait la personnalité du jeune homme. L’oisiveté, la désinvolture, le désintéressement de tout… Que de caractéristiques détestables, pour la plus grande partie de la société. Maintenant encore, il en restait une once dans le regard du jeune homme. Il écoutait les paroles de Topaze, sans pour autant y prêter une grande attention. Le cheminement futur était déjà clair dans son esprit, il n’en demandait pas plus. Il suivrait la jeune femme là où elle désirerait aller, et ne dormirait pas le ventre vide, cette nuit. Simplicité de raisonnement… Cette fois encore, Jared démontrait d’une contradiction complète. Capable de relativiser les moments les plus importants de sa vie, il était cependant incapable d’aborder une journée classique sans tourments psychologiques. Là encore, il y avait du travail à faire…
Aussi, lorsque Topaze eut terminé de proposer divers lieux où passer le reste de la soirée, Jared ne bougea pas le petit doigt. Il semblait réfléchir, perdu dans le bleu des yeux de sa compagne de route… Avait il assimilé le contenu de ses paroles ou était il encore passé de l’autre côté du miroir de la pensée ? La réponse allait fuser, assurant que la deuxième option était la bonne… Pourtant, le jeune homme se décida enfin à cligner des yeux, et reprit un semblant de dynamisme. Avait il réellement besoin de répondre ? Non, évidemment, la réponse était tout trouvée, et n’attendit pas un instant de plus avant d’être lâchée…

"Je ne supporte la société qu’à dose homéopathique. La dose en question a été largement dépassée aujourd’hui. Et… Je ne suis pas contre un retour aux sources…"

Poudlard… Le lieu de tous les développements, de tous les changements. Synonyme de bonheur et de désespoir les plus purs. Jared appréhendait d’y retourner, autant qu’il le désirait. Il traverserait de nouveaux ces couloirs, dont tous comportaient au moins un souvenir. Il arriverait certainement au troisième étage, et contemplerait sa hauteur, si familière…
Un frisson l’assailla tout à coup, à l’évocation silencieuse d’un tel souvenir d’adolescence. Il avait juré ne plus retourner à cet endroit. Mais, que ne ferait il pas pour rester auprès de Topaze ? Le jeune homme connaissait sa nature changeante, et ne pouvait pas prévoir s’il aurait une autre occasion, ainsi qu’une autre envie aussi tenace, de retourner à Poudlard. Il ne reculerait pas devant sa peur, cette fois ci, et satisferait la demande implicite de la jeune femme qui le serrait contre elle avec fermeté.
Quant à son appartement… Il méritait au moins d’en porter le nom, et cela amusait plus Jared qu’autre chose. Il réfléchirait avant de dévoiler le sien à la jeune femme… Le passage des elfes de maison aux rats d’égouts serait difficile, pour Topaze, autant que la découverte du luxe, pour le jeune homme. Intéressant…
Il émit un mince sourire satisfait, mais renonça intérieurement à toute tentative de transplanage. Il n’avait pas oublié les protections qui entouraient le château de Poudlard. Ils prendraient donc le magicobus, et un premier flot de souvenirs tomberait sur le jeune homme…
Détournant ses yeux de Topaze, il scruta la place sur laquelle ils se trouvaient, lui prit la main avec douceur, et l’incita à le suivre, dans les ruelles noirâtres de Pré-Au-Lard. Les deux formes disparurent vite, traînant derrières elles des ombres aussi dissemblables que possibles, porteuses d’un futur incertain…

» ~Balade nocturne...[Pv...]
» Visite Nocturne
» Mauvaise Foi Nocturne
» Aventure nocturne ?
» Fringale Nocturne [PV]