Quel con. Mais quel con ce type. Totalement remontée, la petite rouquine claqua violement la porte de la salle de classe où elle et Roy s'étaient attardés pour ranger les deux trois derniers bouquins utilisés lors de l'heure de sortilèges. Ou plutôt, Claire l'avait forcé à rester plus longtemps. Car là, elle en avait marre. Roy l'évitait un peu plus chaque jours, et il avait une mine affreuse. De grosses cernes, c'est limite si il planait en cours... Elle savait pourquoi, elle n'était pas stupide... Tous les jours elle essayait de lui parler, mais pas moyen, il s'arrangeait toujours pour lui glisser entre les doigts. Espèce de lâche.
- MERDE !
Inutile, oui. Mais ca soulage toujours de gueuler un bon coup. Quoi que... Claire, telle une furie, dévala les escaliers. Il lui sembla entendre la voix du jeune homme derrière elle, mais elle n'écouta pas ses paroles, descendant encore plus vite, la rage au ventre.
- Mais quel con... Quel con...
Se passant la main dans les cheveux tandis qu'elle déboulait dans le hall, elle marmonnait des injures et toutes sortes de menaces, sous le regard étonné des élèves qui la connaissaient bien pour sa bonne humeur en toute circonstances. C'est vrai que là, elle était méconnaissable... Son aspect était négligé... Ses cheveux en pagaille (je veux dire, plus que d'habitude...), son sac mis à l'arrache sur son épaule, des cernes sous les yeux... on pouvait aisement deviner qu'elle ne dormait pas beaucoup ces temps-ci.
- Heu Claire... ? Ca va... ?
- SUPER !
- ...
Elle ne prit même pas la peine de voir qui lui avait adressé la parole. Elle s'en fichait royalement. De l'air. DE L'AIR ! Marre de ces cours, marre de lui, marre de TOUT. Autant Claire était une fille super agréable, souriante et enjouée... mais lorsqu'elle était énérvée (et Dieu sait que c'était rare), c'était une vraie lionne. Elle était alors une vraie tornade: elle pouvait tout détruire sur son passage.
Sortant en trombe du hall, elle pu enfin respirer l'air frais de ce début d'année. Une bourrasque de vent fit voler ses cheveux en tout sens, tandis qu'elle se dirigeait machinalement vers le pommier près du lac. Leur pommier, où Roy et elle passaient des heures à déconner. Tsss.
Jetant violemment son sac au pied de l'arbre, elle traca sa route jusqu'à la rive du lac ou elle s'arrêta enfin, au bord de l'eau. Croisant ses mains sur le sommet de son crane, elle inspira une grande bouffée d'air et soupira avec rage.
- Bandes de cons.
Les mecs... Roy qui ne comprenait rien, John qui avait toujours raison, Paine qui... Une voix interrompit ses pensées.
- Heu... Claire, t'est pas en colle ?
- Et pourquoi je le serais ?!
- Bah... T'est collée à cette heure là non ?
Claire se rappela soudainement qu'elle s'était fait coller la veille pour s'être engueulé trop fort avec Roy dans un couloir alors que des classes avaient cours. Et désormais, elle était sensée être dans la salla des trophées, à astiquer ces maudites coupes.
- Ouaip... J'y vais.
Sans un mot de plus, elle prit congé d'Heath et retourna dans le chateau, récuperant son sac au passage. Merde... Avec toutes ces conneries, elle avait oublié la colle. Tss... Faisant le chemin inverse, encore plus énérvée, elle alla jusqu'à la salle des trophées.
Les mecs. Tous autant qu'ils étaient. Oui, elle avait espéré avec Roy. Invisible aux yeux de Paine, elle s'était laissée séduire par celui auquel elle n'aurait jamais pensé quelques années plus tôt... Roy. Son meilleur ami. Oui, elle avait attendu, inconsciemment. Inconsciemment, elle s'était fait des espoirs. Tsss... Quelle conne. Ils étaient tous pareils. TOUS. Pourtant très bonne amie de John, elle aurait du savoir que les mecs n'étaient que des salauds. Des égoïstes. Ils n'étaient que des bons à rien, des...
Paine. Non, non, les mecs n'étaient pas tous des Paine (dommage...), mais il était là. Lui, le vrai. Paine White. Pas ses milliards de croquis, pas ses rêves fous... lui, le vrai, l'original. Elle venait d'entrer dans la salle et se retrouvait nez à nez avec ce grand dadais. Grand dadais... Waouh. C'était les premiers mots qui lui étaient venus en tête en le voyant. La rage faisait-elle redescendre son dieu au stade de simple mortel, de simple étudiant canon ? Non... c'était quand même Paine White. Son Paine. Elle ressentait toujours la même chose en le voyant. Excepté une chose: la joie qu'il avait toujours eu le don de provoquer en elle. Cette fois, cela ne se produisait pas. Le fait de le voir n'empli pas la jeune fille de ce bonheur inexplicable, de cette joie de vivre qui l'animait en permanence. Claire était la machine, Paine la batterie qui la rechargeait. D'habitude... Mais la machine était épuisée. Usée. Usée par un virus qui, autrefois, était son moteur. Oui, je sors de ma mécanique. Pour faire court, elle en avait plein le...
- Salut...
Honteuse de son état, elle le dépasa jetant un oeil dans la salle. Personne. Ils n'étaient que tout les deux... Frissons. Claire avait toujours eu un peu peur de Paine. Sans trop pouvoir expliquer pourquoi, elle le craignait. Pourtant elle l'aimait. Difficile à expliquer. C'était un peu... un mauvais type. Mais c'est bien pour ca qu'elle l'adorait. Bref, en dehors de cela, sa voix avait soudainement changé de ton. Elle n'était plus brusque, agressive... mais douce, basse... confuse.
Lachant son sac dans un coin, elle retira le pull de l'uniforme de l'école et le posa dessus. Vêtue d'un débardeur (la salle des trophées était toujours chaude. A croire qu'ils bichonnaient les trophées plus que les élèves en cours...) elle s'accroupi, fouilla un instant dans son sac et en sortit un crayon. L'enroulant dans ses cheveux dans une figure compliquée, elle parvint à faire ce qui ressemblait à un chignon désordonné, tenu uniquement par le crayon emmelé dans cette épaisse tignasse rousse. Une fois cela fait, elle vint près de Paine et prit le produit et le chiffon qui l'attendaient sur le bureau à côté du jeune homme.
Elle avait toujours rêvé de cette scène. Une heure de colle où ils se retrouveraient seuls. Dans son imagination, ils parlaient des causes de leur présence ici, en riaient même... Puis ils passaient un bon moment, très bon... Les envies de la jeune femme prenant le dessus sur sa raison, elle imaginait toujours que cette scène finissait... l'un dans les bras de l'autre, s'embrassant fougueusement, et plus si affinités.
Mais maintenant qu'elle était là, réelement... elle se rendait compte que ses rêves, c'était du grand n'importe quoi. Comme si en une heure, il pouvait craquer sur elle et l'embrasser.Tsss. Arrêtes de rêver ma vieille. Toute facon, c'est tous des cons.
Muette, toujours sur les nerfs, elle s'éloigna de quelques pas et commenca sa tache... Si seulement Roy ne faisait pas ses conneries, ce serait certainement le plus beau jour de sa vie.