Rai de Lumière / Souffle de Vent - PV

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Une ombre apparut derrière la porte jaunâtre des Serres, puis la Porte s'ouvrit, créant un rai de lumière dans la Pièce plongée dans l'Obscurité. Une Jeune Femme, aux longs cheveux bruns, qui entouraient son visage fin et blanc, eut un léger sourire, avant de prononcer "Lumos" : la pièce s'éclaira, et elle posa sa baguette sur une table, avant d'observer un peu autour d'elle. Elle oublia de fermer la Porte, qui resta très légèrement entrouverte, permettant ainsi à quiconque de rentrer derrière elle. Elle trouva enfin ce qu'elle cherchait : un interrupteur moldu, sur lequel elle appuya. Pourtant, au lieu d'allumer des lampes "normales", qu'on aurait vu chez tout Moldu, quelques lanternes brillèrent aussitôt de mille feux, et des dizaines d'ombres de plantes se répandirent dans les Serres. Valenna eut un léger frisson mais un sourire s'esquissa sur son visage charmé. Elle reprit sa baguette à la main droite et murmura "Nox", ce qui eut pour effet d'éteindre la faible lueur créée par le batonnet, qu'elle avait choisi de longues années auparavant. Chez Ollivander. Avec sa grand-mère.

*C'était il y a si longtemps maintenant... J'étais jeune, et elle était belle, fière encore... Le visage beau... La voix forte...*

Elle secoua la tête : commencer à penser à cela, c'était partir dans des Souvenirs, et il ne valait mieux pas se plonger dans le Passé, lorsque l'on pouvait vivre plus simplement le Présent - surtout avec un Passé comme le Sien. Elle noua ses cheveux en arrière, à l'aide d'un ruban noir et rouge, puis avança très légèrement, la silhouette de son ombre se dessinant au fur et à mesure de ses pas sur le Sol. A certains endroits, il y avait du carrelage, d'autres de la Terre, et encore bien d'autres Matières. La Serre était grande, et longue à parcourir, surtout avec les nombreuses espèces de plantes qui y dormaient paisiblement. Cependant, en avançant la main, elle découvrit que certaines ne dormaient pas et retira très vite son membre pour ne pas qu'il lui arrive quelque chose de désagréable.

*Ces Plantes cachent bien des propriétés dangereuses... Je devrais faire plus attention...*

La Septième Année eut alors une très légère toux, avant de ranger sa baguette dans sa poche arrière, ce qui lui permettait d'avoir ses deux mains libres, et des mouvements plus amples et réguliers. Un léger souffle de vent passa dans la Serre, et un frisson parcourut tout le long de son échine ; et son sourire s'élargit encore un peu sur son beau visage. Elle douta que la Porte s'était un peu ouverte, mais peu lui importait : que de mal pouvait bien lui arriver en ce moment de bien-être? Elle n'aimait pas se méfier et surtout dans un instant aussi agréable.

*C'est doux d'être paisiblement ici...*

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Des flammes... Brûlantes et dansantes flammes, comme si l'Enfer tout entier s'était invité dans sa paisible maison... La chaleur insupportable du brasier l'étouffait, léchait sa peau et la jeune fille ne voyait rien à travers le rideau de larmes qui lui embuait les yeux. La maison partait en flamme et elle ne pouvait rien y faire...
"Reviens à la maison, j'ai un petit cadeau pour toi", c'était ce qu'il avait dit... Elle avait cru le trouver sur le seuil, souriant et lui tendant les bras, lui demandant de le pardonner et l'appellant "Princesse", comme lorsqu'elle était enfant. Mais non, au lieu de ça il lui avait offert un tas de souvenirs en cendres. Et il avait brisé son coeur aussi...

Elle se réveilla en sursaut et, encore à moitié prise dans les affres de son cauchemar, elle se débarassa violemment de ses couvertures comme si celles-ci avaient représenté un danger quelconque pour sa personne. Elle envoya les draps à l'autre bout de la pièce et, lorsqu'enfin dégagée de ces longs tissus qui l'entravaient, elle fut parvenue à se calmer, elle expira un grand coup. Ses mains tremblaient un peu et ses joues étaient encore humides des sanglots que son rêve lui avait tiré. Elle se leva lentement, alluma les chandelles qui éclairèrent sa chambre, et se dirigea à pas hésitants vers le miroir, accroché au mur. Elle aperçut son visage et afficha un air résigné : elle faisait vraiment peur à voir... Chaque nuit c'était la même chose, la même vision d'horreur revenait la hanter, et le même rire semblait résonner dans ses oreilles... Elle se passa un peu d'eau sur le visage et regarda autour d'elle. La chambre était petite, comme celle des autres professeurs, quelques meubles, le tout étant assez étroit... Des ombres, créées par les bougies, dansaient sur les murs tapissés et elle frémit : cet endroit devenait tellement oppressant après un cauchemar... Il fallait qu'elle sorte.

Elle enfila une robe ceintrée, comme elle les aimait, de couleur rouge vif et faite de velours, pus elle passa une cape noire par dessus, faite du même tissu velouté. Ses éternelles bottes enfilées et sa baguette en poche, elle arpenta les couloirs déserts et silencieux pour se retrouver à l'extérieur du château. Elle apprécia pendant quelques secondes du vent frais du soir sur son visage et tout sensation de peur disparut aussitôt. Elle inspira de grandes goulées d'air pur et un fin sourire se dessina même sur son visage pâle, aux yeux encore rougis par les larmes. Elle rabattit le capuchon de sa cape sur sa tête et elle entama sa promenade nocturne dans le parc. A l'écoute des bruits de la nature, elle repéra quelques mulots et quelques chouettes isolées et ses pas finirent, presque naturellement, par la conduire jusqu'aux serres. En plein jour, la chaleur y était étouffante, mais la nuit, c'était un véritable ravissement et Khal' se sentait rarement aussi bien que dans cet endroit où elle passait le plus clair de ses journées.

Ses yeux furent aussitot attirés par un détail troublant : une des portes de la serre était entr'ouverte alors qu'elle aurait pu juré l'avoir fermée avant de s'en aller. Ses soupçons se confirmèrent lorsqu'elle vit la serre s'éclairer de l'intérieur et Khal' grogna vaguement quelque chose. Cet endroit était un petit peu son jardin secret et elle acceptait mal que quelqu'un s'y promène la nuit sans sa permission. Elle s'approcha de la porte et elle l'ouvrit davantage pour pouvoir se faufiler dans la serre, ce qui eut pour effet de créer un léger courant d'air qui traversa la pièce de bout en bout. Khal' repoussa la porte en silence et elle finit par la refermer complètement sans que cela ne produise le moindre bruit.

Elle observa la silhouette féminine qui lui tournait le dos mais elle reconnut les longs cheveux bruns de la jeune fille qui se tenait devant elle. En effet, elle avait eu tout le loisir de la voir de dos lorsque cette même demoiselle avait quitté son cours sans prévenir. Nonchalemment, Khal' s'appuya contr e une des parois de verre de la pièce et elle croisa les bras, affichant une moue dubitative et perplexe. Elle resta silencieuse quelques minutes encore puis, comme la jeune fille ne sembalit pas avoir remarqué sa présence, elle se décida à parler. Elle s'employa à utiliser une voix douce et avec un faible volume pour ne pas effrayer ou surprendre la jeune fille.

Miss Pemal...? Quelle surprise...

Aucune émotion ne transparaissait dans sa voix : purement laconique, neutre et sans intonation. Depuis toujours ses sentiments ne s'exprimaient que dans son regard et la surprise qu'elle éprouvait ne pouvait se lire que dans ses yeux à cet instant précis.

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Valenna appréciait en silence cette beauté qui émanait de cette Serre, comme un Jardin Secret, et cette solitude renforçait encore ce sentiment, car c'était un Paradis qu'elle seule appréciait en cet instant, qu'elle seule pouvait observer à loisir sans se faire chahuter par des élèves, ou des Professeurs soucieux de faire respecter leur autorité. Lorsque le coup de vent passa dans la Serre, elle ne s'en souciait pas, et ne savait même pas si quelqu'un était rentré, ou si la porte s'était simplement ouverte ; mais la question l'importait peu, tout ce qui comptait, c'était le bien-être agréable qui l'envahissait d'instant en instant. Cependant, elle sentit une présence, peu après, et ferma les yeux, comme elle était de dos, la personne qui - sûrement - l'observait, ne pouvait voir ce geste ; et elle tenta de descripter les émotions qu'elle ressentait en ne pouvant voir celui ou celle qui l'épiait en ce moment. Etrangement, elle ressentit fortement une présence mature, adulte, car sinon la personne aurait parlé avant, et quelqu'un qui, plus que tout, l'avait reconnu, donc qu'elle connaissait, car sinon la personne se serait manifesté. Il était très probable que ce soit une Professeur étant donné l'heure et la force qui émanait de cette présence invisible, et soudain Valenna sursauta : ça ne pouvait être que la Professeur de Botanique ! Et la voix le lui prouva. Elle resta un instant de dos.

"Bonsoir Madame, dit-elle d'une voix douce et respectueuse."

En effet, elle avait appris le respect, dans le dernier cours, qui s'était plutôt mal passé, mais qui avait bien continué, pour tout dire, non seulement parce que Valenna était revenue, mais parce que Khâlina était avant tout une bonne Professeur. Valenna hésita quelques secondes puis se retourna, observant la silhouette de la jolie femme, aux yeux rougis, qui l'observait. Valenna sut dans un sursaut de stupeur que la nuit s'était mal passé et que c'était pour cette raison que Khâlina était là - elle veilla soigneusement à n'en rien laisser paraître.

"Si c'est pour me demander des explications, reprit-elle en hésitant, je... n'en ai pas."

Elle baissa lentement la tête, car elle avait douté : mentir ou dire la vérité? Elle avait entendu la voix de Noémie dans son esprit "mentir mentir mentir" puis une voix légèrement angélique - comme dans les films Moldus - "vérité vérité vérité". Forcément, elle les avait fait taire et avait réfléchi avant de se dire que puisqu'elle se sentait aussi bien, elle n'allait pas s'embourber dans une histoire sans queue ni tête. Elle releva un instant la tête, et ses yeux bleus brillèrent légèrement.

"Désolée, acheva-t-elle."

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Khal' continuait d'observer la jeune fille avec un intérêt croissant, se demandant ce que la jeune Serdaigle pouvait bien faire dans la serre à une heure pareille. L'espace d'un instant, l'idée qu'elle se soit introduite dans la serre pour se venger de la brimade qu'elle avait subie en cours effleura l'esprit de la jeune professeur mais elle y renonça finalement. Valenna était une jeune fille trop intelligente pour commettre de telles exactions et, de plus, Khal' ne voyait pas ce qui aurait pu la pousser à le faire : elles avaient réglé leur petit différend, cette solution n'était donc pas la bonne... Ce n'est qu'après avoir entendu la jeune fille la saluer d'une voix douce et tranquille et sans se retourner que Khal' comprit que Valenna avait peut-être, tout simplement, eu envie, elle aussi, de profiter de la beauté de la serre, la nuit. C'était la possibilité la plus plausible... Dans l'immédiat en tous cas...

La jeune Serdaigle était toujours de dos, comme si elle craignait d'affronter la vue de son professeur, qu'elle jugeait peut-etre un peu trop sévèrement depuis leur altercation et Khal' en fut peinée... Elle aimait être appréciée de ses élèves tout en les sentant soumis à son autorité. Khal' décroisa les bras et les fourra dans les poches de sa robe, continuant à fixer la nuque de Valenna mais des milliers de pensées se bousculant dans sa tête. Elle était dans un état de lassitude extrême et rien ne pouvait plus la distraire depuis quelques temps : ses gestes se faisaient lents, ses paupières lourdes et chacun de ses efforts lui apparaissait comme inutile. Elle ne sentait plus vivre, mais survivre et encore, survivre à grand'peine et parfois, elle avait des envies de sommeil éternel et ininterrompu. Elle retrouva subitement ses esprits lorsqu'elle s'aperçut que Valenna se tournait enfin vers elle...

Lorsqu'elle l'eut face à elle, Khal' la détailla de son mieux, écoutant la faible défense qu'elle avait à lui opposer. Défense qui se réduisait au néant le plus total, soit dit en passant... Cependant, par chance, khal' était d'humeur clémente ce soir et, avant d'avoir entendu les prétextes inexistants de la jeune fille, elle avait déjà décidé de ne pas sévir. Elle regarda Valenna baisser la tête, peut-etre honteuse, ou simplement en signe de soumission... Elle l'ignorait et cela lui importait peu. Cest alors que la jeune Serdaigle releva le visage, la fixant de ses yeux bleux et brillant pour lui adresser un dernier et simple "désolée". Khal' se contenta d'hocher la tête de façon fort peu expressive et elle finit par dire, se redressant et renonçant à s'appuyer à la paroi de verre :

Ne le soyez pas, Miss Pemal... Je ne sais pas ce que vous êtes venue faire dans cette serre et, à vrai dire, je m'en moque un peu... Ce qui importe désormais c'est que vous y êtes et que je ne peux pas vous ramener au château avant que le garde-chasse ait fini sa ronde si je ne veux pas que vous soyez punie pour votre petite escapade... La question qui se pose donc maintenant est : que faire du temps qui nous est imparti ?

Elle lui adressa un léger sourire et alla s'asseoir sur une chaise, située un peu plus loin et à demi dans l'ombre ce qui lui permettrait de dissimuler ses yeux rougis à la vue de son élève, en espérant que celle-ci ne l'ait pas déjà remarqué.

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Valenna avait sérieusement peur que Khâlina la punisse, car elle ne connaissait pas encore beaucoup la Professeur, et ne connaissait pas ses habitudes quand aux élèves qui admiraient les Serres en pleine nuit. Apparemment, Khâlina hocha juste de la tête avec un sourire laconique, et se mit dans un coin d'ombre, rapidement, sûrement pour que les détails de son visage fatigué n'apparaissent pas aux yeux de Valenna. Mais celle-ci les avait déjà vu et se demandait anxieusement ce qui avait bien pu arriver à la Professeur de Botanique pour qu'elle ait des yeux aussi rougis, et des cernes aussi longues ; confuse, elle cessa d'y penser.
Khâlina commença alors à parler, et Valenna accorda une attention toute particulière à chaque mot : au début, elle était certaine que la Professeur allait lui "offrir" une sanction, car son "L'important c'est que vous soyez là" allait peut-être révéler une punition autoritaire derrière. Au contraire, Valenna découvrit que Khâlina n'avait nulle intention de la punir, et qu'elle cherchait simplement à savoir ce qu'elles pourraient faire en attendant que le garde-chasse ait fini sa ronde ! Secouant la tête, éberluée, Valenna commençait tout juste à reprendre ses esprits quand elle lut le sourire de Khâlina ; elle le lui rendit, et ses lèvres s'étirèrent gaiement sur tout son visage.

"... Merci, répondit-elle d'abord, en réfléchissant. Et bien peut-être que vous pourriez m'en apprendre un peu sur ces plantes... Et puis après on pourrait..."

Les mots restèrent dans sa gorge car son ton hésitant montrait qu'elle avait peur d'être trop audacieuse. Où était la Noémie qui bravait tout dans son coeur? Disparue ! Elle cherchait juste à passer un bon moment avec Khâlina maintenant, mais veilla à ne pas aller trop vite dans ce genre d'instants. Donc sa phrase s'étant arrêtée d'elle-même, elle la reprit.

"... en apprendre plus l'une sur l'autre, murmura-t-elle dans un souffle presque inaudible."

Ses yeux s'étaient détourné vers les Plantes, certaines immenses, et d'autres petites, et elle sentit un léger malaise l'envahir : comment pouvait-elle dire à Khâlina qu'elle souhaitait devenir son... amie? Elle baissa la tête puis la releva finalement avec détermination.

"Nous pourrions approcher de l'amitié, déclara-t-elle enfin d'une voix nette."

*HJ : Je suis désolée ; j'ai vraiment privilégié la quantité à la qualité, ce qui donne des résultats bizarres et pas toujours très intéressants...HJ*

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Khal' crut comprendre que la jeune fille avait été surprise par sa réaction clémente quand elle observa avec attention le visage de Valenna. En elle-même, quelque chose se déchira quand Khal' comprit par cela que ses élèves se trouvaient étonnés qu'elle puisse se montrer gentille... Ainsi, elle devait sans doute passer pour une despote auprès d'eux et, tout en lui faisant plaisir, cette vision qu'il pouvaient avoir d'elle, la blessa profondément. Passant sa main glacée sur son visage blême, elle se demanda intérieurement depuis quand elle avait pu passer auprès des autres pour une jeune femme sévère et tyrannique. Sans aucun doute possible depuis qu'elle était entrée comme professeur à Poudlard : elle s'était prise au jeu de transformer l'établissement en école de magie noire et les mauvais traitements qu'elle infligeait aux élèves lui permettaient d'évacuer ses propres démons chimériques et intrinsèques. Parfois, ils prenaient le dessus et elle se retrouvait à torturer de la plus horrible façon qui soit de jeunes élèves... Et ce qui était sans doute le pire c'était qu'elle aimait ça... Il n'y avait aucune méprise possible quand elle repensait au jeune Serpentard dont elle s'était faite la tortionnaire il y a peu : pour lui avoir fait subir ce qu'elle lui avait fait subir, elle ne pouvait qu'apprécier de voir souffrir les gens sous ses coups... Tout comme elle aimait souffrir sous les coups des gens...

Elle sortit juste à temps de ses pensées volatiles pour entendre les paroles de Valenna qui lui arrachèrent un sourire. De l'amitié...? Khal' ignorait ce que c'était, n'ayant toujours vécu que pour elle-même ou du moins, se persuadant qu'elle ne vivait que pour elle alors qu'il n'en était sans doute rien. Il suffisait de la voir avec Tatsuya, son fiancé, pour se rendre compte qu'elle mentait. Elle caressa distraitement une plante carnivore qui se trouvait à sa portée et qui semblait se plier sous ses caresses comme l'aurait fait n'importe quel animal de compagnie. Parfois, Khal' se surprenait elle-même de cette symbiose avec les plantes et elle n'avait toujours pas su comprendre comment elle parvenait à réussir certains exploits impensables avec les végétaux. Elle chssa cette idée de son esprit déjà bien préoccupé et elle reporta son attention sur la jeune Serdaigle.

Ces plantes... Nous en parlerons en cours... Alors autant passer directement à la suite...

Elle frotta ses paupières qui la brulaient légèrement, sans doute à cause des larmes qu'elle avait versé cette nuit et jetant un dernier coup d'oeil à sa main exsangue, elle poursuivit :

Vous ne semblez plus m'en vouloir pour notre dernier cours... Ou alors vous vous trouvez ici pour une autre raison que celle de la beauté nocturne des serres...

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Valenna remarqua que la Professeur de Botanique était plongée dans ses pensées, et elle en profita pour libérer son esprit : elle le faisait souvent lorsqu'elle était en compagnie de quelqu'un silencieux, ou quelque part d'autre pour un moment, car cela lui permettait de réfléchir - relativement vite - à certaines choses qu'elle avait entre autres termes reculées dans son esprit. Par exemple, elle pensait en ce moment-même au Professeur de Défense contre les Forces du Mal, non pas parce qu'elle en était tombée "amoureuse", ou quelque chose du genre, comme la plupart des filles qui avaient été à son cours, mais plus parce qu'elle avait été amusée par cette intelligence séductrice qui émanait de l'homme. Elle ne put s'empêcher de laisser se dessiner sur ses lèvres un sourire révélateur, qui laissait percer ses pensées sur son visage, fait qu'elle désapprouvait car on pouvait ainsi plus facilement lire en elle ; évidemment pas dans ses pensées, mais cela était tout de suite plus "visible". Elle reprit donc une expression indescriptible, chassant aussitôt l'image du Professeur de son esprit pour reporter son regard sur la Professeur, qui caressait tranquillement une plante carnivore ; celle qui avait failli faire du mal à la Serdaigle. Cependant, cette fois, elle resta douce, et sage, sans aucun mouvement brusque ou dangereux, et Valenna fut impressionnée par le pouvoir qui émanait de Khâlina aux côtés de ces plantes. Elle lui jeta un regard qui exprimait ces pensées, puis reprit un air neutre, alors que la Professeur reparlait.

Valenna ne fit que très légèrement hausser les épaules : si Khâlina ne voulait pas parler des plantes, c'était qu'elle avait peut-être quelque chose de plus intéressant à dire. Après un court silence, la Serdaigle comprit qu'en effet, elle avait trouvé bien mieux, ce qui la fit d'ailleurs sourire.

"Vous en vouloir? répéta-t-elle avec le même sourire. Je ne vous en voulais pas, pour ainsi dire, mais vous aviez juste été... directe. Cependant, j'aime l'exigence d'un Professeur durant un cours ; cela me prouve qu'il est intelligent. Etrange paradoxe, non? ajouta-t-elle."

Elle passa alors sa main dans ses longs cheveux bruns, tandis que ses bracelets cliquetaient de nouveau avec gaieté ; et elle cligna plusieurs fois des yeux. Puis elle tourna les yeux vers les Plantes et s'approcha de l'une d'elle, qui paraissait tout à fait inoffensive, avançant très légèrement sa main. Rien ne se passa. Alors elle préféra reculer : le silence avant l'orage, ici le calme avant le danger. Elle opta donc pour la prudence et alla s'adosser contre le mur de la Serre, de l'autre côté de Khâlina ; elles étaient cependant directement visibles, sans plante ou table au milieu.

"Et vous, demanda-t-elle avec une audace dont elle ne se serait pas crue capable, venez-vous simplement ici pour la beauté nocturne des Serres?"

Il était évident qu'elle avait remarqué les yeux rougis et l'air pâle de Khâlina ; maintenant si la Professeur voulait garder ses raisons pour elle, il n'y avait rien à faire. Elle attendit donc avec un sourire laconique.

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Khal' écouta la réponse de Valenna avec attention et elle sourit. La jeune fille lui plaisait beaucoup par sa présence d'esprit et son caractère tranquille, presque aussi tranquille qu'une source. Cependant elle ne doutait pas que Valenna puisse réserver quelques surprises car le vieil adage ne dit-il pas : "Méfiez-vous de l'eau qui dort." ? Elle ignorait ce qu'elle devait attendre de la jeune Serdaigle mais en ce moment, Khal' ne pouvait se permettre de décliner l'offre d'une amitié apparemment spontanée et sincère. Elle ne pouvait pas se faire l'ennemi de tous ses élèves tout comme elle ne pouvait pas se faire l'amie de tous ses collègues : trop de différences entre eux et trop de traitres potentiels...

Etrange paradoxe, en effet... Mais qu'est-ce qui ne l'est pas de nos jours ?

Se servant d'une phrase qui revenait souvent dans les conversations, d'un topos à l'évidence, elle répondait tout en évitant de dévoiler le fond de sa pensée. Elle voulait préserver son jardin secret mais en même temps, elle aurait aimé pouvoir se révéler à Valenna, dusse-t-elle être la seule personne à qui elle eut dû se montrer vraiment. Cependant la confiance de Khal' était quelque chose qui se gagnait mais qui, une fois obtenue, vous était indéfectible. Elle regarda la jeune fille avancer la main vers une plante et la retirer presque aussitot après une hésitation sans doute trop longue. Parfois, Khal' s'étonnait de ce que les gens craignent tant ses petites protégées mais elle ne pouvait pas leur en vouloir après tout... Le plus simple était d'expliquer patiemment pour inspirer la confiance...

Vous auriez pu la caresser... Elles sont calmes ce soir... Etrangement calmes...

Elle se souvint alors que Valenna lui avait posé une question tandis qu'elle était perdue dans ses pensées et elle fit un effort de mémoire pour ne pas avoir à lui faire répéter sa demande. Au bout de quelques minutes silencieuses, la voix de Valenna résonnait clairement dans sa tête ainsi que sa question. Khal' haussa les épaules : que devait-elle dire ? Mensonge ou vérité ? Elle se décida finalement pour la vérité et elle répondit :

Oui... Pour la beauté nocturne de la serre, sans doute... Mais surtout car c'est le seul endroit dans le chateau où je me sens en sécurité après un cauchemar... Horrible cauchemar...

Elle la regarda en souriant et se leva lentement, pour ouvrir la porte de la serre qu'elle avait refermé en entrant : la chaleur était étouffante. Après avoir vérifié que le garde-chasse ne trainait pas dans le coin, elle consentit à s'éloigner de l'entrée. Elle revint vers la jeune fille et s'assit sur une table pas loin d'elle.

Vous aussi, vous avez d'autres raisons que la beauté nocturne de la serre pour vous y balader ?

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Face à la question rhétorique de Khâlina, Valenna ne sut absolument pas quoi dire : qu'est-ce qui n'est pas un paradoxe? C'était une remarque intelligente, mais elle la laissait sans voix, ce qui était toujours mauvais dans l'ordre d'une discussion, à part quand l'interlocuteur sait comment la relancer, et la Serdaigle se rendit compte que sa Professeur de Botanique faisait partie de ces personnes-là. Elle regarda avec un sourire Khâlina caresser les plantes, sans aucun problème apparent, ni conséquence qui créérait des problématiques à n'en plus finir, et considéra la remarque de la Professeur comme d'autant plus juste qu'elle la concernait elle-même. Ainsi, elle hésita, puis s'approcha des plantes, mais secoua finalement de la tête.

"Je ne préfère pas, dit-elle avec un sourire, m'attirer des problèmes. Je considère que ce n'est pas nécessaire..."

A part cela, Valenna attendait toujours la réponse à sa question des plus audacieuses, et restait silencieuse et presque anxieuse en attendant une réaction car elle craignait avoir trop poussé les révélations de Khâlina, avoir frappé trop fort pour une premiière approche. Cependant, son interlocutrice lui répondit avec beaucoup de franchise et de maîtrise de soi. Valenna comprit soudain la raison de ces yeux rougis, et de cet air pâle et faitugé: Khâlina avait fait des cauchmeras, et avait pleuré, se réveillant ainsi, et venant dans les Serres pour y trouver du réconfort. Valenna sentit son corps se serrer, mais elle ne pouvait dire de mot rassurant à cette femme, qui était beaucoup plus forte et importante qu'elle... qui était-elle donc pour tenter de la rassénérer? Avant tout une élève. Elle baissa donc la tête puis la releva à l'écoute de la question, dévisageant ainsi Khâlina.

"Ma colocataire n'est pas rentrée au dortoir cette nuit, expliqua-t-elle, et quand je suis seule là-haut... j'ai..."

Sa voix s'étrangla et elle détourna le regard en cherchant de la force parmi les lumières tremblotantes des torches, qui tentaient d'éclairer son esprit. Khâlina avait dit la vérité, elle se devait donc de faire de même.

"... j'ai... peur."

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Avec un sourire, Khal' la vit approcher sa main des plantes desquelles elle s'était éloignée quelques instants plus tôt. Durant quelques secondes, tandis que la main de la jeune fille était suspendue par l'hésitation, elle eut le secret espoir que la jeune Serdaigle caresse les plantes, mais elle ne le fit pas. Le sourire de Khal' s'effaça lentement et tristement, tandis qu'elle se rendait à la triste évidence : personne ne pourrait la comprendre puisque personne ne comprenait les plantes. Quoiqu'en y réfléchissant, qu'y avait-il donc à comprendre ? Elle avait renié le code de l'honneur que ses parents et son maître bouddhiste lui avait inculqué et depuis qu'elle était ici, force lui était de constater qu'elle avait de nouveau sombré dans la violence et que ses fantômes l'avaient rattrapée. Mais après tout, elle pouvait toujours se donner bonne conscience, si besoin était, en se convainquant que c'tait son père qui avait initié le lent processus dont elle était aujourd'hui le résultat : en brûlant la maison de son enfance, sa maison polonaise, il savait sans doute qu'il détruirait un morceau d'elle en même temps. Pourtant, il l'avait fait et la colère qu'elle avait éprouvé à ce moment là avait contribué à la transformer en la femme qu'elle était aujourd'hui : un rôle de sévère despote qu'elle prenait plaisir à jouer désormais.

La phrase de Valenna l'extirpa de ses mornes pensées et lui arracha un sourire proche du rictus. Les problèmes, les ennuis, les risques, tout cela était propre à la vie de l'Homme, il était inutile de vouloir y échapper. Est-ce que les Grecs de la Grèce Antique s'étaient imaginés un seul instant pouvoir échapper aux Trois Parques ? Sans doute pas, mais l'Homme Moderne se croyait au-dessus des forces essentielles de la Nature, elle avait pu le constater plus d'une fois. D'une voix douce et calme comme un lac au printemps, elle murmura, pareille à une cascade chuchotante entre les reohers calcaires d'une montagne :

Le tout est de savoir choisir ses problèmes... Je suis intimement convaincue que nous pouvons décider desquels nous préférons affronter...

Théorie purement bouddhiste, une vieille légende concernant le "karma" et les "shakras" mais elle avait envie d'y croire et elle aurait aimé quel les autres le croient aussi... Khal' sembla surprise lorsque la jeune fille lui avoua qu'elle avait peur, seule dans les dortoirs, et elle hocha la tête d'un air compréhensif. Combien de nuits blanches avait-elle passé à attendre que Letizia regagne son lit lorsqu'elle était élève ici et combien de nuits sans dormir à partir du jour où Ange avait été assassinée dans leur propre salle commune ? Beaucoup, des dizaines, peut-être plus... Elle regarda Valenna de ses yeux sombres, une pointe de compassion perçant dans ses iris foncés, un vague sourire scotché sur les lèvres.

Je vous comprends... Je ne vous comprends que trop bien...

Un aveu, à demi-mots, un morceau de passé dont elle levait presque le voile... Elle se leva avec lenteur et se dirige vers l'une des armoires de la serre, son ombre vacillant sous les lampadophores. Arrivée au meuble de bois, elle fit tourner la clé dans la serrure et en sortit une fleur de lotus rosée, posée sur la plus haute étagère. De nouvelles larmes montèrent à ses yeux mais elle profita du fait qu'elle tournait le dos à Valenna pour les réfrener et elle se dirigea vers sa jeune élève. D'un geste doux, elle lui mit la fleur dans les mains et elle referma les doigts de Valenna sur la plante. Le lotus était étrangement rigide, on aurait presque pu le croire empaillé par un taxidermiste particulièrement zélé mais, cependant, il dégageit encore les effluves qui emplissaient les narines des moines bouddhistes dans les jardins des temples. Une fragrance apaisante, dissipatrice de tous les troubles psychologiques. Elle désigna la fleur d'un geste de main et dit :

Elle m'a beaucoup aidé à une certaine époque. Désormais, elle ne peut plus rien pour moi... C'est de bon coeur que je vous l'offre...

Invité

Valenna regardait en silence la Professeur de Botanique, immobile comme en quête d'autres signes sur son visage pâli par l'effort, et la courte nuit, interrompue par des cauchemars provoquant aussitôt l'insomnie. Combien de fois la Serdaigle aussi avait du affronter cette situation : se réveiller en sursaut au milieu de la nuit, pleurer à n'en plus finir, puis courir dans les bras de sa grand-mère, qui lui murmurait que tout cela était dans le passé, et qu'elle pouvait se rendormir. Et toutes ces fois-là, Valenna allait se recoucher, pour n'embêter personne, et surtout pas sa protectrice, et gardait les yeux ouverts, vers le plafond, et elle revoyait toutes les scènes de son enfance, avec des sanglots silencieux. Pourtant, à chaque fois, aussi silencieuse qu'elle tentât d'être, sa grand-mère se levait, et venait se coucher près d'elle, et, aussitôt, Valenna se sentait mieux, car si elle était à ses côtés, rien ne pourrait lui arriver ; c'était une certitude. Certitude qui fît que la mort de sa grand-mère, à ses quatorze ans, assassinée par un sbire de son père, l'avait ébranlé encore plus, avec douleur, et chagrin, par multitudes terribles.

Maintenant, les dortoirs vides et plongés dans l'obscurité lui faisaient toujours peur : pièces sombres et pleines des fantômes du passé ; et elle ne pouvait laisser les lumières, car cela était plus ou moins interdit là-haut. Ainsi, quand sa colocataire ne revenait pas, elle prenait un parchemin, ou bien son sac, dans lequel elle mettait toutes les affaires qu'elle affectionnait, et descendait toutes les marches du chateau, pour sortir. C'était cependant la première fois qu'elle allait ainsi dans la Serre, et était heureuse d'avoir pu y trouver Khâlina ce soir, car la Professeur n'était pas sévère avec elle, et Valenna espérait qu'elle en connaîtrait plus sur ce visage dur. Les yeux rougis et la face pâle étaient - à priori - un bon début.

Elle passa la main dans ses longs cheveux bruns, tout en écoutant la réplique de Khâlina. "Le tout est de savoir choisir ses problèmes... Je suis intimement convaincue que nous pouvons décider desquels nous préférons affronter...", dit la Professeur, et Valenna resta silencieuse avec la stupeur de quelqu'un qui réfléchit.

"Ce n'est pas ma théorie, répondit-elle enfin. Non pas que je pense qu'il existe un Destin prédéfini, et des lignes dans un grand rouleau qui gît parmi les Nuages, mais... Comment dire? C'est pour moi une évidence que nous pouvons faire certains choix, mais je ne crois pas qu'on peut choisir ses problèmes, enfin..."

Elle se tut, car ses mots se perdaient dans l'air infini d'un mystère d'une des plus grandes questions posées par l'humanité : le hasard et les coïncidences existaient? Et le Destin? Et toutes ces choses-là? Le mystère de la Vie était plein partout et personne ne pouvait se vanter d'avoir percé le brouillard qui l'entourait. Aussi, Valenna cessa vite de se poser des questions, et reposa les yeux sur Khâlina, qui affirmait comprendre sa peur des dortoirs vides et obscurs, mais comme pour elle-même, comme pour exprimer ce qu'elle pensait tout bas. C'était étrange, comme découvrir inconsciemment une partie de l'âme de la Professeur, et les yeux de Valenna brillèrent devant la franchise aussi directe et précieuse de Khâlina.

Cependant elle ne répondit rien, et la regarda se retourner, avant de fouiller dans une armoire. Quand son autre main remonta au niveau de son visage, Valenna comprit que c'était pour sécher des larmes, et elle se demanda si c'était simplement pour cela, et que l'armoire avait été un prétexte, lorsqu'elle vit Khâlina attraper une plante au dernier étage. Un... lotus. La surprise de Valenna s'exprima profondément dans ses yeux : la croyance d'abord, et le lotus ensuite. Cela était-ce une coïncidence ou bien Khâlina avait été éduquée... autrement? Cette question resta en suspens, car la Professeur s'approchait. Elle lui tendit la plante, la mit dans ses mains, et Valenna la garde là, surprise. Quand elle entendit les mots de Khâlina, ses yeux se mirent aussi à briller.

"Je... répondit-elle, sa voix étranglée quelque part dans son esprit. Je... vous suis profondément reconnaissante. C'est un cadeau merveilleux si un jour il a pu vous aider... Je... Merci."

Invité

Khal' saisit l'émotion de la jeune fille et elle ne répondit que par un sourire rassurant. Voulant lui laisser le temps de se remettre de sa surprise, Khal' détourna le regard et se dirigea vers la porte de la serre, comme pour vérifier que personne n'arrivait. Le vent frais lui fit l'effet d'une gifle et ses yeux se mirent à briller de nouveau en repensant à la fleur de lotus.

"Trzeba lubic ten kwiat" disait son père dans sa langue natale...

Elle se souvenait comme si c'était hier du jour où son père lui avait offert cet étrange lotus qui n'avait jamais fané et qui n'avait jamais perdu son parfum. Comme des lambeaux de rêves oubliés sur les stalactites du sommeil, ces moments de vie heureuse refaisaient surface en même temps que cette fleur tant aimée. Elle n'avait compris que bien plus tard pourquoi son père lui avait fait ce présent : symbole de la sérénité, le lotus lui avait apporté une paix d'esprit qui ne l'avait jamais quitté. Elle avait réalisé il y a peu de temps que sa vie basculait lorsqu'elle n'avait plus la fleur près d'elle, comme lorsque son père avait disparu, la laissant seule après la mort de sa mère.

"Garde toujours ce lotus près de toi..."disait cette dernière dans ses souvenirs flous...

La dernière fois qu'elle s'en était séparée, elle avait sombré dans la drogue, connu quelques gangs et seul dieu sait comment elle était parvenue à revenir à Poudlard après ces deux mois de vacances chaotiques parmi les Moldus. Quand elle avait rejoint les dortoirs cette année-là, personne ne voulait partager sa chambre, une odeur mortifère semblant l'accompagner dans chacun de ses mouvements. Finalement, ayant été nommée préfète, comme une ultime chance qu'on lui donnait, ses deux camarades préfètes elles-aussi l'avaient accepté dans leur chambre, lui redonnant goût à la vie. Déçue par son père, elle ne se soucia plus jamais du lotus.

Retrouvé récemment dans ses cartons, lorsqu'elle avait emménagé à Poudlard, elle l'avait relégué dans l'armoire de la serre. Elle ne voulait plus l'avoir près d'elle, préférant ressentir la douleur et la cruauté de la vie qu'obtenir la paix intérieure par l'intermédiare de son père. Elle atteindrait le Nirvana seule, celui dont Kusanaghi, son maître, lui avait parlé : seule, comme les grands maîtres taoïstes... Une larme roula sur sa joue et elle l'essuya d'un revers de main rageur : pourquoi pleurer ? Quel intérêt ? C'était le lot des faibles et elle refusait d'en être. Ses yeux balayèrent l'aire du parc et grâce à sa vue aiguisée - elle était quasiment nyctalope -, elle s'assura que le garde-chasse ne traînait pas dans le coin. Elle se tourna vers Valenna, les yeux fixés au sol, sans la regarder, et elle murmura presque à regret :

"Je crois que la voie est libre..."

Invité

Valenna tenait le lotus dans ses mains, serrées contre la jolie plante, mais pas trop tendues, pour ne pas l'abîmer, et elle la gardait en vue, silencieusement, comme le cadeau le précieux qu'on lui aurait fait ; et il faisait sûrement partie de ceux-là en effet. La Professeur de Botanique était plongée dans ses pensées, et la Serdaigle en profitait pour se remettre de ses émotions, mais rien n'y faisait : son coeur battait si vite, et si fort, qu'elle craignait que Khâlina l'entende. Le Lotus était beau, et épanoui, et il semblait si calme ; son parfum si apaisant, que Valenna se sentit aussitôt mieux, et sut que la peur ne lui reviendrait plus dans sa solitude nocturne ; elle serait maintenant toujours accompagnée. Tandis que cette certitude s'ancrait en elle, un long bâillement s'extirpa de sa poitrine malgré elle, car il était tard malgré tout, et cela faisait un long moment qu'elle discutait avec Khâlina, qu'elle n'avait pourtant pas du tout envie de quitter.
Elle passa sa main libre dans ses cheveux bruns puis soupira longuement avant de relever les yeux. Elle vit que Khâlina pleurait et cette action la laissa sans voix, interloquée par cette scène si difficile à assumer pour n'importe quelle adolescente autre qu'elle, car elle était habituée maintenant aux larmes des adultes : sa mère, sa grand-mère, puis son grand-père. Oui, c'était quelque chose qu'elle avait déjà vécu, mais voir cette Professeur qui paraissait d'habitude si solide et impassible verser des larmes était... autre chose. Elle détourna les yeux, pour ne pas troubler la pudeur, l'intimité en quelque sorte, de Khâlina, puis écouta sa voix normale avec surprise.

"Je crois que la voie est libre..."

Valenna tourna la tête presque violemment, mais sans bruit, regardant Khâlina pendant quelques instants, sentant une part de son âme se déchirer : elle devrait maintenant quitter la Professeur de Botanique et peut-être ne connaîtraient-elles plus jamais un moment de telle intimité, un tel rapprochement. Oui, c'était un instant unique, et Valenna le savait ; elle pensait en avoir profité le plus possible, et, après avoir relevé une dernière fois la tête vers les yeux emplis de larmes de Khâlina, elle hocha de la tête.

"Bien, répondit-elle en un souffle. Merci... Pour tout."

Elle lui jeta un dernier regard furtif, et sentait déjà des larmes perler dans ses yeux ; elle ne pouvait les chasser, car elle avait la main prise par le lotus. Deux larmes coulèrent sur chacune de ses joues et tombèrent vivement sur le sol, alors que Valenna s'échappait de la Serre, faisant attention à ne pas faire de bruit, le coeur empli d'émotions, et la course silencieuse, avant de pénétrer dans la chateau.

» Les feuilles dans le vent...