Impatience et mauvaise foi [Allan]

Le carillon retentit tandis que Lyssa franchissait la porte pour sortir du magasin. Elle glissa une main dans le sachet de papier qu'elle tenait et en extraya un livre imposant. C'était un manuel d'astrologie, particulièrement complet, écrit par son idole, Elisabeth Teissorcier, grande astrologue et sociologue du monde magique. Elle allait enfin pouvoir compléter ses connaissances en la matière, et sans doute également s'en servir dans ses cours l'année prochaine.

En effet, l'année scolaire touchait à sa fin, et elle avait prévu pour l'année qui suivait d'élargir l'éventail des sujets de son cours. Un peu de sociologie ne ferait pas de mal aux élèves, et la sociologie passait non seulement pas l'arithmancie, mais également par l'astrologie, la chiromancie, la graphologie et autres arts divinatoires utilisés pour étudier le caractère d'une personne. Car Lyssa ne s'intéressait qu'à ça, et non à l'avenir. Elle laissait ça au professeur de Divination.

Elle pensait au départ se lancer dans la psychologie magique, ironie quand on connaissait le passé psychiatrique de la jeune femme. Mais ne dit-on pas que les psychologues sont souvent les plus fous ? Finalement, elle préféra la sociologie, plus soft.

Elle remit le gros livre dans le sac, en compagnie des autres qu'elle avait acheté. Le sac était plutôt lourd mais elle ne s'en souciait pas. Elle était juste pressée de rentrer pour lire en paix.

Il faisait doux en cette journée de fin de printemps, et les cheveux de la directrice de Serpentard arboraient une belle couleur rousse qui flamboyait sous les rayons du soleil. Elle avait choisi le roux pour représenter son humeur du moment, impétueuse et radieuse, grâce à l'été qui approchait, synonyme de chaleur et de vacances. Des vacances, elle en avait bien besoin. Peut-être irait-elle à Wizfun. Ou pourquoi pas à l'étranger, dans le sud de la France ou en Italie. Au soleil en tout cas. Elle observa la peau laiteuse de son bras en se mordant légèrement la lèvre inférieure. En réalité, elle pouvait bronzer par la simple pensée, mais elle aimait son teint diaphane. Si elle avait besoin de soleil, ce n'était pas pour sa peau, mais parce qu'il lui procurait une intense énergie.

Perdue dans ses pensées et le regard fixé sur son avant-bras, elle ne regardait pas où elle marchait et bouscula quelqu'un. Le sac qu'elle portait tomba à terre. Elle leva vers le fautif - car évidemment, c'était lui qui l'avait bousculé pour elle, et non l'inverse - des yeux d'un rouge aussi profond que la couleur de ses cheveux.

Lyssa, d'une voix sifflante - Faites attention !

Elle s'aperçut alors qu'elle venait de bousculer un jeune homme et ses yeux redevinrent gris, un gris plus foncé que d'ordinaire. Elle se pencha pour récupérer son sac, d'un geste si sec qu'elle le déchira en partie, marmonnant dans le même temps des excuses au jeune homme - peu crédibles - et diverses protestations. Elle n'aimait pas être retardée.

Allan n’avait rien à faire. Chose rare. Chose, pour une fois, totalement imprévue. En effet, le jeune homme avait pour habitude de respecter une routine, elle-même réglée par un emploi du temps immuable. Tout s’était déroulé comme à l’accoutumée le reste de matinée, en revanche, lorsqu’il était allé chez son libraire, celui-ci avait fermé. Aucun avis, aucun mot de la part du propriétaire pour prévenir d’une telle chose, et cela mettait Allan dans une colère sourde que son visage n’exprimait que par un très léger froncement de sourcils. Ce fut donc quand Allan, complètement désoeuvré, contemplait d’un œil maussade une vitrine d’équipements de Quidditch, sport qu’il avait toujours déconsidéré, qu’une femme le bouscula. Il grommela un vague « beuh » sans grande hostilité et regarda l’inconnue s’excuser, après quelques paroles moins sympathiques, puis tenter de ramasser un sac de papier kraft ayant déversé son contenu littéraire sur le sol pavé de pierres grises et froides. Celui-ci se déchira, témoignant de sa précipitation ce qui fit sourire intérieurement le gamin.

Il s’accroupit avec sa lenteur toute particulière, se saisit d’un des volumes reliés de cuir foncé. De l’astrologie. Pas sa tasse de thé. Il grimaça et le fit pivoter dans sa grande main pâle pour en lire le quatrième de couverture. Il se redressa et le tendit à la sorcière, plongeant ses yeux vides d’expressions dans ceux de l’inconnue, gris acier.

– Fameuse lecture. Pas à mon goût mais reconnue.

Ces deux phrases étaient de loin les plus banales qu’il n’ait jamais prononcées, mais bien sûr, peu lui importait. Il essuya d’une geste précautionneux sont costume de flanelle et jeta un regard un peu plus froid et englobant à son interlocutrice.

– Vous devriez faire attention, fit-il remarquer, un jour vous vous ferez mal ou tomberez sur quelqu’un de moins courtois que moi.

Il la fixa avec une expression bien particulière sur son visage mutin. Le genre d’expression arborée lorsque l’on ne sait plus trop quoi dire mais qu’un terrible impression nous tiraille sans même que l’on sache pourquoi. En réalité, si Allan hésitait c’était simplement parce qu’il avait l’impression de déjà avoir aperçu cette femme dure et sèche. Il haussa intérieurement des épaules.

[HRP: Désolée, pas inspirée]

[HJ : C'est de l'astrologie, pas de l'astronomie ]

Tandis qu'elle se relevait, elle remarqua que l'inconnu s'était saisit du livre d'Elisabeth Teissorcier pour en connaître le thème. Elle fronça les sourcils, et arracha l'ouvrage d'un mouvement hâtif alors qu'il le lui tendait. Elle n'aimait pas que n'importe qui touche à ses livres. Par souci d'hygiène et aussi parce qu'ils étaient précieux. Surtout celui-ci. Elle y tenait beaucoup.

L'inconnu - Fameuse lecture. Pas à mon goût mais reconnue.

Le gris des yeux de la jeune femme devint des plus métalliques. Il n'aimait pas l'astrologie ? Sans doute avait-il quelques préjugés à ce sujet, comme beaucoup. Elle avait horreur des gens qui n'étaient pas ouverts d'esprit.

L'inconnu - Vous devriez faire attention, un jour vous vous ferez mal ou tomberez sur quelqu’un de moins courtois que moi.

Elle le fusilla du regard. C'était la meilleure. Elle eût plutôt dit de l'indolence que de la courtoisie. Il eût sans doute réagi de la même manière avec n'importe qui, peut-être même avec n'importe quoi. Elle esquissa un sourire sarcastique.

Lyssa - Courtois ? Il ne me semble pas vous avoir entendu vous excuser pour m'avoir bousculée.

La couleur de ses iris oscillait entre le gris acier et le bleu polaire.

Lyssa - Vous ne croyez pas en l'astrologie n'est-ce pas ? Laissez-moi vous dire quelque chose...

Elle planta ses yeux dans ceux du jeune homme, et fit un sourire malicieux. Ses propres yeux étaient cette fois devenus d'un bleu très clair.

Lyssa - Je suis certaine que vous êtes sagittaire.

Elle haussa les épaules comme si elle s'attendait à l'avance à ce que le jeune homme fût surpris.

Lyssa - Il n'y a qu'eux pour être aussi conformistes et rester aussi calmes en pareilles circonstances. Vous êtes ambitieux n'est-ce pas ? C'est le propre du sagittaire.

Pour beaucoup de gens étudiant l'astrologie, il n'était certainement pas si net que le jeune homme était sagittaire. Il n'avait montré qu'une partie superficielle de sa personnalité, et plusieurs signes auraient pu y correspondre. Mais Lyssa était très douée pour ça. Elle savait également lire dans les lignes de la main et analyser les écritures. Mais elle s'en servait rarement, elle n'aimait pas particulièrement ces deux dons. L'astrologie était plus intéressante.

[HRP: Bouah, excuse-moi j'avais pas bien vu x] ]

Il se gratta le lobe de son oreille droite, parée de ses éternels piercings, avec une indifférence insultante, baissa ses yeux noirs de nouveau vers ceux de la jeune femme, remarquant alors que ceux-ci changeaient de teinte. Une métamorphomage ?

– Dans la mesure où j’étais immobile c’est vous qui m’êtes rentrée dedans…

Lyssa – Vous ne croyez pas en l'astrologie n'est-ce pas ? Laissez-moi vous dire quelque chose... Je suis certaine que vous êtes sagittaire.

Il se demande un instant si sa date de naissance n’était pas gravée sur son front, ne démontra aucun signe d’un intérêt ou d’une surprise particulière et fit la moue avant d’ajouter d’un ton faussement avenant :

– Laissez-moi vous dire autre chose… Vous devez être célibataire vu votre sécheresse ou alors c’est ce qu’on appelle le syndrome prémenstruel…

Il marqua une pause après cette énormité vulgaire. Tout du long, son ton n'avait perdu en rien ce timbre grave et agrèable qui aurait pu passer pour sympathique sans prendre compte du fond de ses paroles. Être troublé dans son quotidien ne lui réussissait guère et cela faisait en effet voler en éclat son habituelle courtoise indifférence ainsi que son faste rhétorique. Un vent doux vint troubler cette charmante conversation, ébouriffant la coupe enfantine de l’auror qui finit par lâcher :

– Si je réponds oui vous en serez satisfaite je suppose, bien alors soyez heureuse de vous, en effet je nourris certaines ambitions.

Il n’aimait pas la façon qu’avait l’inconnue de changer de couleur d’iris, cela finissait part devenir troublant et agaçant. Les êtres doués de ce genre de pouvoir particulier étaient répértoriés dans les archives de recensement du ministère, Allan y avait eu accès pour la recherche de certains sorciers dangereux, mais il était idiot de tenter de s’en souvenir si cette personne en faisait effectivement partie, car si elle changeait constament d’apparence, même l’âge indiqué ne lui serait d’aucune utilité.

L'inconnu - Dans la mesure où j’étais immobile c’est vous qui m’êtes rentrée dedans…

Elle ne prêta même pas attention à cette phrase. Pour elle, il était évident qu'il était tout autant en tort qu'elle, sinon plus. Il sembla embêté par sa découverte, ce qui signifiait sans aucun doute qu'elle ne s'était pas trompée. En revanche, il ne répondit pas de la façon la plus galante qui soit, bien au contraire.

L'inconnu - Laisse moi vous dire autre chose… Vous devez être célibataire vu votre sécheresse ou alors c’est ce qu’on appelle le syndrome prémenstruel…

Elle faillit s'étrangler devant tant de muflerie. Et elle en fut piquée au vif, car non seulement elle était célibataire, mais elle sortait d'un divorce éprouvant qui faisait suite à une rupture humiliante. Son ex-mari était un affreux coureur de jupons, et elle ne s'était pas remise de ses diverses infidélités. Ayant déjà la santé psychologique fragile, ça n'avait fait qu'aggraver les choses. Mais il l'aimait toujours, elle le savait. Ou plutôt, elle le pensait. En réalité, elle n'avait toujours pas admis le divorce, et ne s'empêchait pas de s'inventer elle-même des aventures extra-conjugales.

L'inconnu - Si je réponds oui vous en serez satisfaite je suppose, bien alors soyez heureuse de vous, en effet je nourris certaines ambitions.

Son ton était certes plus conciliant, mais elle restait blessée. Elle en eût pleuré si elle n'avait pas tant d'orgueil. Mais ses yeux s'était considérablement assombris, témoignant de sa profonde mélancolie. Elle planta ses iris presque noirs dans ceux du jeune homme. Son regard était lourd de reproches, mais on pouvait plus y lire de la tristesse que du mépris.

Lyssa - Comment osez-vous ?

Puis elle sembla soudain se reprendre, et fit un sourire sardonique.

Lyssa - De toutes façons, vous vous trompez. Je suis mariée.

Sur ces dires, elle montra sa main gauche au jeune homme. Malheureusement pour elle, elle venait d'oublier qu'elle n'avait plus d'alliance. Après son divorce, elle avait continué à la conserver, mais avait eu droit à une scène de la part de son ex-mari, qui avait finalement récupéré la bague.

Prise de panique, elle abaissa sa main, honteuse.

Lyssa - J'ai oublié de la mettre.

Pitoyable argument. Elle changea très vite de conversation en souriant.

Lyssa - En tout cas, j'avais raison sur votre signe, vous ne pouvez le nier.

La couleur de ses yeux ne s'était toujours pas éclaircie.

L'inconnu - Je m’appelle Allan Blackhorn, je pèse environ soixante-dix kilos, je mesure près d’un mètre quatre-vingt et j’ai horreur des sucreries… bien maintenant que vous êtes au courant de mes vices, à savoir une certaine agressivité en manque de caféine, ainsi que d’informations personnelles, pourrions-nous éviter d’aborder un sujet aussi vaseux que l’astrologie ?

Elle leva les yeux sur lui, estomaquée. Que lui prenait-il tout à coup ? Pourquoi lui racontait-il tout ça ? Elle fit la moue. Vaseux, l'astrologie ? Elle détestait entendre ce genre de chose. C'était vaseux pour les moldus, assez stupides pour être complètement terre-à-terre - ils ne croyaient même pas à la magie ! -, mais les sorciers savaient très bien ce qu'il en était.

Et voilà qu'en plus, comble de goujaterie, il s'en allait ! Elle croisa les bras, puis s'apprêta à les décroiser pour partir à son tour. Mais alors qu'elle joignait le geste à la pensée, il se retourna, et Lyssa vit sur son visage une expression qu'elle n'avait encore jamais vue. Il semblait gêné. Regrettait-il ce qu'il avait dit ?

Blackhorn - Veuillez m’excuser.

Elle se détendit et poussa un léger soupir de soulagement. Elle préférait cette situation. Elle s'efforça de sourire pour paraître moins acariâtre.

Lyssa - Ce n'est pas grave, vous avez raison. Laissons tomber tout ceci. Je suis Sinlyssa Slyhope, directrice de Serpentard à Poudlard. Enchantée.

Elle lui tendit une main fine et pâle. On eût presque dit qu'elle était transparente. Ses yeux avaient retrouvé leur gris habituel, un gris doux et limpide. Elle ne précisa pas non plus son âge, n'ayant toujours pas accepté d'avoir atteint la trentaine. C'était d'ailleurs très récent. Elle savait d'ailleurs qu'elle paraissait plus jeune que son âge et en profitait. D'ailleurs, ce Blackhorn semblait très jeune... Elle eût presque pensé qu'il était élève à Poudlard. Il devait sans doute être étudiant. Elle n'osait pas poser la question, venant elle-même d'annoncer qu'elle était directrice de Serpentard. Peut-être eût-elle dû éviter de préciser cela, car les directeurs de maison étaient en général âgés. D'ailleurs, lui-même n'avait pas précisé son activité.

Sinlyssa – Ce n'est pas grave, vous avez raison. Laissons tomber tout ceci. Je suis Sinlyssa Slyhope, directrice de Serpentard à Poudlard. Enchantée.

Si Allan nourrissait un tel mépris pour l’astrologie, c’était simplement que, malgré son flegme délicieusement anglais, il était intimement persuadé que seuls les actes définissait l’avenir et qu’il ne dépendait que de celui qui le façonne. Préférant omettre sa profession, il fut rassuré de voir que la jeune femme ne lui tenait pas trop rigueur de sa déplorable attitude et n’usait pas des ses plates excuses comme arme. Bien entendu, bouillonnait toujours une sourde aversion pour elle, par pur préjugé, mais il s’efforçait tant bien que mal d’en passer outre et finit par tendre sa main pour serrer celle de l’enseignante d’une vive et brève pression.

– Enchanté.

Il ramena ses mains dans les poches de son costume, eut un très vague et furtif sourire tout en se demandant ce qui convenait de faire, maintenant pardonné mais ne pu que demeurer distant.

– Ah… hm… prononça-t-il lentement. Son tic verbal revenait sans qu’il le déplore vraiment, après tout il s’en foutait. Il remarqua alors qu’il dominait Sinlyssa d’une tête puis continua :

– Alors, Madame Slyhope, fit-il avec une pointe de sarcasme, serait-il possible que vous pardonniez mon manque de politesse si je vous offrais à boire ?

Il ne fallait pas voir là un grand acte de galanterie ou d’intérêt, simplement Allan avait dit vrai : il était en manque de caféine et aurait donné n’importe quoi pour s’asseoir, son flegme devenant désormais paresse. Tout en parlant, il désigna d'un signe de tête un café avec terrasse non loin d’eux mais déjà bien fréquenté, les sorciers heureux du beau temps en profitant pleinement.

L’anglais ne paraissait aucunement mal à l’aise à ce moment là, au contraire il avait retrouvé son discret charisme, sa nonchalance charmante mais son indifférence s’était changée en une attente que même son visage ne trahissait pas. Sinlyssa était devenue intéressante dès qu’elle eut informer le gamin qu’elle se trouvait être la Directrice de Serpentard, en effet, il s’agissait là de son ancienne maison et, de plus, il pourrait peut-être en savoir un peu plus sur les réformes y ayant eu lieu, ne les ayant apprise que de façons floues dans divers journaux. Ses grands yeux noirs n’exprimaient pas grand-chose tandis qu’il restaient fixés sur la jeune femme, il semblait ailleurs bien qu’attentif, endormi bien que d’une vive réflexion, paradoxal dans son immuabilité.

Au pire, il se retrouverait à siroter un jus de chaussette en compagnie d'une professeur plus cultivée que lui qui le bassinerait avec des ouvrages d'astrologie ou d'autres branches obscures magiques tandis qu'il lui enverrait à la gueule du Dickens ou du Flaubert/

Le jeune homme lui rendit sa poignée de main puis retrouva un court instant la flegme qui semblait si bien le définir. Apparemment, il n'avait pas tiqué sur le métier de la jeune femme, il y paraissait même complètement indifférent. Elle se demandait si c'était volontaire. Si elle n'était pas certaine de ne jamais l'avoir eu comme élève, elle se poserait des questions. Cela dit, elle s'en posait tout de même, justement parce qu'elle ne se rappelait pas de lui et qu'il semblait pourtant très jeune. Même s'il était étudiant, elle l'eût sans doute aperçu. Néanmoins, il était possible qu'elle ne se souvînt pas de tous les anciens élèves de Poudlard, d'autant qu'elle était professeur d'Arithmancie, qui n'était qu'une option, et pas la plus demandée.

Blackhorn - Alors, Madame Slyhope...

Elle se pinça les lèvres, quelque peu agacée, non pas par le "madame", mais par le "madame" suivi de son nom de famille. Elle s'appelait encore madame peu de temps auparavant, mais avec un autre nom de famille. Ce mot associé à son nom de jeune fille lui donnait la très désagréable impression d'être une vieille fille. Mais c'était sa faute, elle lui avait dit qu'elle était mariée, il était donc normal qu'il emploie cette politesse.

Blackhorn - Serait-il possible que vous pardonniez mon manque de politesse si je vous offrais à boire ?

Elle haussa les sourcils, un peu surprise par cette proposition soudaine, qui était à l'opposé du comportement du jeune homme envers elle depuis le départ. Elle sourit toutefois, se disant qu'elle allait peut-être pouvoir répondre à cette question qui la taraudait en discutant avec lui.

Lyssa - Je pense que c'est possible, en effet. A condition que vous ne m'emmeniez pas dans un bar moldu.

Elle se moquait de sembler intolérante - ce qu'elle était toutefois -, elle ne supportait pas d'être entourée de moldus, d'une part parce que ça la mettait mal à l'aise, et d'autre part parce qu'elle ne pouvait pas se comporter et parler comme elle le voulait.

Lyssa – Je pense que c'est possible, en effet. À condition que vous ne m'emmeniez pas dans un bar moldu.

Allan aurait pu avoir un galant sourire ou signe de tête entendu. Et bien non, il se contenta de désigner de nouveau le café voisin où une table en terrasse s’était libérée et de vaguement murmurer :

– Je n’en avais pas l’intention.

L’anglais se demanda un instant ce qu’il convenait de faire : proposer son bras, ouvrir la marche ou la laisser avancer la première ? Il opta pour la solution cachée et se contenta d’avancer du même pas que l’enseignante mais tira sa chaise pour l’avancer une fois qu’elle se fut installée. Il prit place sans lui accorder un regard, désormais obnubilé par le café imminent. Il eut pourtant la courtoisie d’attendre que Sinlyssa fasse son choix et héla l’un des garçons de café pour passer commande.

Il s’affala un peu plus sur le dossier de sa chaise dans une pose décontractée mais d’une certaine élégance tandis qu’il reposait son regard sur la jeune femme. Il eut soudain l’air d’un moineau surpris par une grosse pluie. Bon Dieu… et maintenant ? Allan n’était pas du genre à discutailler gentiment sur une terrasse ensoleillée. Il laisse tomber l’idée aussi rapidement qu’elle était venue et se détendit de nouveau, son visage recouvra son masque d’éternelle neutralité et il fixa un point invisible au-dessus de l’épaule de Sinlyssa tout en pianotant sur la table en osier tressé. Il avait horreur de cette matière et cesse de suite de la tripoter.

Près d’eux, une petite fille sirotait seule un énorme milk-shake. Elle était blonde comme les blés, pourvue d’immenses yeux bleus et paraissait si adorable qu’un détraqueurs eut hésité à l’embrasser. Vêtue d’une salopette bleue nuit sur un tee-shirt blanc, dotée d’une paire de couettes, elle semblait être le parfait stéréotype de la gentille fillette que tous parents rêveraient d’avoir. Etant en dehors du chant de vision d’Allan, il n’y prêta pas attention, ce qui n’était pas son cas : elle ne le quittait pas des yeux et ne cillait que rarement, comme ahurie, la paille de sa boisson à la vanille dans la bouche. Tout ce que ressenti le jeune homme fut un désagréable frisson qui lui caressa l’échine.

Il y avait quelque chose de comique et de dérangeant dans cette scène. Mais… surtout comique en fait.

[HRP: C'est très court, je te demande pardon, je ferai mieux au prochain post]